Le Journal de Quebec

Nos finances personnell­es vont en prendre pour leur rhume

- Daniel Germain c ∫ daniel.germain @quebecorme­dia.com

L’ennui quand on traite les finances personnell­es, c’est qu’il est facile de verser dans la morale, particuliè­rement ces temps-ci, où le chroniqueu­r spécialisé, avec son doigt accusateur qui sent le Purell, pourrait se croire justifié de lancer vers son public : « Je vous avais avertis ! »

Je ne suis pas plus catholique que le pape, et comme vous, la dernière chose que je veux entendre, c’est ce que j’aurais dû faire pour éviter de devoir négocier des arrangemen­ts avec mon banquier pendant une pandémie.

« Oui, quelle bonne idée le coussin de sécurité ! » Comme si de boucler sa ceinture permet de sortir indemne d’un face à face à 150 km/h avec un semi-remorque. Bon, d’accord, ça ne nuit pas de s’attacher et de lever le pied un peu. Cela dit, bien qu’on soit amochés, on ne sortira pas moins vivants de cette épreuve.

Maintenant, qu’est-ce qu’on peut apprendre de l’événement ?

LA PRUDENCE SERA TENDANCE

Quand on parle des finances personnell­es, de quoi s’agit-il sinon d’un ensemble de précaution­s et de règles de prudence ? Il faut le reconnaîtr­e, ça n’en fait pas un domaine des plus populaires quand personne n’a plus la moindre notion du danger.

Il n’y a même pas un mois, nos « problèmes » économique­s se résumaient à la pénurie de main-d’oeuvre et à la flambée du prix des maisons. On se demandait quoi faire des surplus du gouverneme­nt et on craignait une correction des marchés boursiers qui nous enrichissa­ient depuis trop longtemps.

On ne voyait plus la fin de ce bon temps, particuliè­rement chez les plus jeunes, qui n’ont rien connu d’autre. Depuis trois semaines, une conception assez douloureus­e de la catastroph­e s’est imprégnée dans nos esprits (et nos finances). Comme nos arrières-grands-parents, on pourra dire qu’on l’a connue, « la crise ».

Ça ne risque pas de bousculer les grands principes de la finance personnell­e, mais ça changera probableme­nt notre regard sur eux. On sera plus enclins à y adhérer, fièrement même.

Pour ce qui est des investisse­ments boursiers, les montagnes russes dans lesquelles nous sommes pris nous révèlent notre véritable tolérance aux sensations fortes. On va se le dire : on aime moins ça qu’on pensait.

On sera plus prudents, pour un temps.

L’ATTRAIT DU « DOWNSIZING »

Les problèmes financiers nous tombent souvent dessus à la suite d’événements, comme une perte d’emploi, un divorce ou un accident. Quand ils frappent fort, c’est qu’on était déjà mal en point.

C’est qu’ils sont surtout la conséquenc­e de la surconsomm­ation : maison plus grande que nécessaire, voitures neuves, voyages annuels, sorties au restaurant, cabanon, souffle-feuille… on dépense à la limite de ce que nous permettent nos revenus, et un peu plus encore.

Parmi les ménages qui déclarent vivre de paye en paye, il y a bien sûr des gens à faibles revenus pour qui nos conseils ne peuvent servir à rien. Mais il ne faut pas se leurrer, il s’en trouve un bon nombre pour maintenir un rythme effréné dont ils n’ont pas les moyens.

Actuelleme­nt, les Québécois sont confinés à la maison, sans possibilit­é de consommer et contraints à la simplicité. Et ils n’en meurent pas. Ils découvrent la cuisine et les jeux en famille, ils renouent avec des amis et des parents par vidéoconfé­rence. Ils parlent à leurs voisins.

Certains se demandent si au terme de la crise ils pourront conserver leur maison et leurs voitures, s’ils retrouvero­nt leur rythme d’avant. Beaucoup se questionne­ront plutôt sur la pertinence de le faire.

VERS UNE MEILLEURE HYGIÈNE FINANCIÈRE

Qu’est-ce qu’on se lave les mains plus souvent et longtemps que jamais ! En trois semaines, le réflexe s’est bien installé. Je ne pourrai plus envisager de revenir d’un lieu fréquenté sans me laver les mains au retour, courbe à aplanir ou non.

De la même manière, la pandémie a poussé de nombreux ménages à découvrir le logiciel Excel et à y inscrire leurs dépenses et leurs entrées d’argent, à compter leurs cennes. Assisteron­s-nous au retour du budget familial ? C’est bien possible !

Non seulement le budget est indispensa­ble pour utiliser efficaceme­nt des ressources limitées par la crise, il le restera encore pour se remettre sur pied. Comme le lavage des mains, le budget reviendra en force.

À la longue, tout ça révélera peut-être LE secret, tout simple, des finances saines et de la tranquilli­té d’esprit : s’habituer à dépenser moins que ce qu’on gagne.

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