Nos finances personnelles vont en prendre pour leur rhume
L’ennui quand on traite les finances personnelles, c’est qu’il est facile de verser dans la morale, particulièrement ces temps-ci, où le chroniqueur spécialisé, avec son doigt accusateur qui sent le Purell, pourrait se croire justifié de lancer vers son public : « Je vous avais avertis ! »
Je ne suis pas plus catholique que le pape, et comme vous, la dernière chose que je veux entendre, c’est ce que j’aurais dû faire pour éviter de devoir négocier des arrangements avec mon banquier pendant une pandémie.
« Oui, quelle bonne idée le coussin de sécurité ! » Comme si de boucler sa ceinture permet de sortir indemne d’un face à face à 150 km/h avec un semi-remorque. Bon, d’accord, ça ne nuit pas de s’attacher et de lever le pied un peu. Cela dit, bien qu’on soit amochés, on ne sortira pas moins vivants de cette épreuve.
Maintenant, qu’est-ce qu’on peut apprendre de l’événement ?
LA PRUDENCE SERA TENDANCE
Quand on parle des finances personnelles, de quoi s’agit-il sinon d’un ensemble de précautions et de règles de prudence ? Il faut le reconnaître, ça n’en fait pas un domaine des plus populaires quand personne n’a plus la moindre notion du danger.
Il n’y a même pas un mois, nos « problèmes » économiques se résumaient à la pénurie de main-d’oeuvre et à la flambée du prix des maisons. On se demandait quoi faire des surplus du gouvernement et on craignait une correction des marchés boursiers qui nous enrichissaient depuis trop longtemps.
On ne voyait plus la fin de ce bon temps, particulièrement chez les plus jeunes, qui n’ont rien connu d’autre. Depuis trois semaines, une conception assez douloureuse de la catastrophe s’est imprégnée dans nos esprits (et nos finances). Comme nos arrières-grands-parents, on pourra dire qu’on l’a connue, « la crise ».
Ça ne risque pas de bousculer les grands principes de la finance personnelle, mais ça changera probablement notre regard sur eux. On sera plus enclins à y adhérer, fièrement même.
Pour ce qui est des investissements boursiers, les montagnes russes dans lesquelles nous sommes pris nous révèlent notre véritable tolérance aux sensations fortes. On va se le dire : on aime moins ça qu’on pensait.
On sera plus prudents, pour un temps.
L’ATTRAIT DU « DOWNSIZING »
Les problèmes financiers nous tombent souvent dessus à la suite d’événements, comme une perte d’emploi, un divorce ou un accident. Quand ils frappent fort, c’est qu’on était déjà mal en point.
C’est qu’ils sont surtout la conséquence de la surconsommation : maison plus grande que nécessaire, voitures neuves, voyages annuels, sorties au restaurant, cabanon, souffle-feuille… on dépense à la limite de ce que nous permettent nos revenus, et un peu plus encore.
Parmi les ménages qui déclarent vivre de paye en paye, il y a bien sûr des gens à faibles revenus pour qui nos conseils ne peuvent servir à rien. Mais il ne faut pas se leurrer, il s’en trouve un bon nombre pour maintenir un rythme effréné dont ils n’ont pas les moyens.
Actuellement, les Québécois sont confinés à la maison, sans possibilité de consommer et contraints à la simplicité. Et ils n’en meurent pas. Ils découvrent la cuisine et les jeux en famille, ils renouent avec des amis et des parents par vidéoconférence. Ils parlent à leurs voisins.
Certains se demandent si au terme de la crise ils pourront conserver leur maison et leurs voitures, s’ils retrouveront leur rythme d’avant. Beaucoup se questionneront plutôt sur la pertinence de le faire.
VERS UNE MEILLEURE HYGIÈNE FINANCIÈRE
Qu’est-ce qu’on se lave les mains plus souvent et longtemps que jamais ! En trois semaines, le réflexe s’est bien installé. Je ne pourrai plus envisager de revenir d’un lieu fréquenté sans me laver les mains au retour, courbe à aplanir ou non.
De la même manière, la pandémie a poussé de nombreux ménages à découvrir le logiciel Excel et à y inscrire leurs dépenses et leurs entrées d’argent, à compter leurs cennes. Assisterons-nous au retour du budget familial ? C’est bien possible !
Non seulement le budget est indispensable pour utiliser efficacement des ressources limitées par la crise, il le restera encore pour se remettre sur pied. Comme le lavage des mains, le budget reviendra en force.
À la longue, tout ça révélera peut-être LE secret, tout simple, des finances saines et de la tranquillité d’esprit : s’habituer à dépenser moins que ce qu’on gagne.