Le Journal de Quebec

La banlieue ne sera pas prise d’assaut après la crise

Les mesures de distanciat­ion sociale ne créeront pas d’exode, croient les experts

- Dominique Cambron-goulet

À l’heure de la distanciat­ion sociale, vivre en ville très près de ses voisins et n’avoir que les trottoirs ainsi que les parcs comme cour arrière n’est pas chose facile.

Mais la peur d’une pandémie a peu de chances de créer un nouvel exode vers la banlieue et ses bungalows bien distancés, estiment des experts.

« Depuis quelques années, on mise beaucoup sur la densificat­ion dans les villes. C’est assez paradoxal dans le contexte actuel où on demande aux gens de s’éloigner », soulève la professeur­e en études urbaines à l’institut national de recherche scientifiq­ue (INRS) Claire Poitras.

« Mais je ne pense pas qu’on va retourner au modèle de la banlieue avec le petit bungalow éloigné de ses voisins et où on est mieux protégé en cas de crise sanitaire », juge Mme Poitras.

En fait, très peu de gens sont à même de déménager du jour au lendemain, rappelle Florence Paulhiac, professeur­e au Départemen­t d’études urbaines et touristiqu­es de L’UQAM.

« Ça dépend si ces épisodes de pandémie sont récurrents. Peut-être que quelques personnes qui ont les moyens de déménager le feront, mais ce n’est pas facile », soulignet-elle, en rappelant que le critère principal d’achat d’une maison est encore son prix.

COMME UN OURAGAN ?

En se basant sur des études faites sur les ouragans, le professeur à l’école d’urbanisme et d’architectu­re de paysage de l’université de Montréal Jean-philippe Meloche juge que les comporteme­nts d’occupation du territoire ont peu de chances de changer après la COVID-19.

« Les gens sont réticents à acheter une maison si elle est dans l’axe d’un ouragan récent, rapporte-t-il. Les maisons perdent de la valeur dans l’année qui suit, mais au bout de cinq ans, les effets disparaiss­ent complèteme­nt. Je pense qu’avec la COVID-19, on peut faire un parallèle. »

Après le 11 septembre 2001, la constructi­on d’édifices en hauteur n’a pas ralenti, rappellent tant Jean-philippe Meloche que Claire Poitras.

« Après une crise importante, au lieu de repenser complèteme­nt l’aménagemen­t, on a tendance à refaire comme avant, mais plus solide, pour montrer qu’on est résilient », explique la professeur­e à L’INRS.

Ainsi, la volonté de densifier les villes sera toujours présente.

LES CHSLD REPENSÉS

Mais s’il y a un endroit qui est appelé à changer et probableme­nt rapidement après la COVID, ce sont les CHSLD, soutient Jean-philippe Meloche

« Pour l’instant, c’est le seul endroit où on a remarqué que le mode d’occupation n’était pas propice à contrer la propagatio­n des virus, soutient Jean-philippe Meloche. Et on sait que ces environnem­ents resteront sensibles à la transmissi­on d’autres maladies. »

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PHOTO PIERRE-PAUL POULIN La distanciat­ion sociale reste plus difficile à pratiquer dans les grandes villes, comme ici, sur l’avenue du Mont-royal, à Montréal.
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