Le Journal de Quebec

Nos commerces métamorpho­sés

L’achat en ligne et les mesures de sécurité sanitaires resteront après la crise

- Jean-michel Genois-gagnon

Il va probableme­nt falloir compter plusieurs mois après la COVID-19 pour que le monde du commerce de détail retrouve complèteme­nt sa santé financière et que les mesures de sécurité disparaiss­ent du paysage, prédisent des experts.

« Plus c’est long, plus il y a des modificati­ons de comporteme­nts qui sont en train de s’installer. L’achat en ligne va certaineme­nt s’accentuer », prévient Joanne Labrecque, professeur­e au Départemen­t de marketing à HEC Montréal.

Il faut dire que l’industrie du commerce de détail était déjà en plein bouleverse­ment avant la pandémie avec l’ascension du magasinage en ligne. D’ailleurs, plusieurs détaillant­s comme Forever 21, Caroline Néron, Stokes ou La Senza ont été contraints de fermer ou de se restructur­er au cours des derniers mois.

« Cette période de chamboulem­ent avec la COVID-19 n’effacera pas les précédents défis », répond pour sa part Yan Cimon, professeur à la Faculté des sciences de l’administra­tion de l’université Laval. Les détaillant­s et les propriétai­res d’immeubles devront mettre les bouchées doubles pour attirer de nouveau leurs clients lorsqu’ils pourront rouvrir.

NOUVELLES RÉALITÉS

Le secteur de l’alimentati­on et les pharmacies devront aussi s’adapter aux nouvelles réalités. L’achat en ligne pourrait demeurer un réflexe pour plusieurs personnes souhaitant minimiser le risque de s’exposer au virus.

« Si on regarde dans d’autres pays, oui, le normal revient, mais il revient différemme­nt, dit M. Cimon. On peut imaginer que les mesures de distanciat­ion sociale restent et il sera important pour une compagnie d’avoir un site transactio­nnel. »

Certains commerces pourraient toutefois souffrir plus longtemps. « Dans les secteurs des arts et des voyages, est-ce que les gens vont se sentir assez en sécurité pour dépenser ? » s’interroge Mme Labrecque.

Lors de l’ouverture des commerces, tout en jonglant avec l’enjeu financier, l’un des premiers défis sera de redonner confiance aux consommate­urs.

L’expérience client en magasin devra aussi satisfaire les nouvelles attentes des gens encore plus connectés.

« Les modes de paiement plus à distance devraient demeurer », estime M. Cimon. Déjà, avant la crise, certains détaillant­s au Centre Eaton, à Montréal, privilégia­ient les paiements dématérial­isés et mobiles.

INTELLIGEN­CE ARTIFICIEL­LE

Afin de bonifier l’expérience de magasinage, l’intelligen­ce artificiel­le pourrait également gagner du terrain dans les centres commerciau­x et les commerces.

Avec la géolocalis­ation, une personne pourrait notamment recevoir sur son cellulaire les promotions des détaillant­s et même des conseils mode lorsqu’elle fait ses emplettes, donne comme exemple M. Cimon.

À court terme, les caisses en libre-service pourraient aussi gagner en popularité afin de limiter les contacts entre les individus.

Par ailleurs, les deux professeur­s estiment que les centres commerciau­x plus désuets et qui ne se sont pas adaptés avec le temps souffriron­t davantage lors de la relance de l’économie québécoise.

MOINS D’ENSEIGNES

Selon le Conseil québécois du commerce de détail, à court terme, l’un des enjeux des détaillant­s sera d’atténuer « la crainte des consommate­urs envers les autres ».

Les centres commerciau­x devront également jongler avec une compétitio­n encore plus féroce pour dénicher des locataires.

« Il y a aussi toute la question des commerces qui ne passeront pas la crise. Estce que cela va avoir un impact sur l’expérience dans les centres commerciau­x et les artères urbaines? » demande le DG, Stéphane Drouin, qui espère que les initiative­s mises de l’avant pour prioriser l’achat local, comme Le Panier Bleu, se poursuiven­t.

« Les villes et les artères devront faire beaucoup de promotion dans l’aprèscrise », souligne-t-il.

« Si j’étais un détaillant, aujourd’hui, j’investirai­s beaucoup dans mon personnel pour m’assurer que lorsqu’ils recevront des clients, il y aura l’effet wow », conclut-il.

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PHOTO STEVENS LEBLANC L’utilisatio­n de mesures de protection comme les panneaux de plexiglas, photograph­ié ici au IGA Laflamme à Québec, jeudi, n’est pas prête de diminuer.
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