Le Journal de Quebec

Près de 1000 milliards $ qu’on devra rembourser

Les nombreuses mesures d’aide vont plomber les finances publiques du Canada

- Jules Richer

Plombée par la crise de la COVID-19, la dette fédérale risque de frôler bientôt les 1000 milliards $ – soit 1 billion $ –, un chiffre jamais vu au Canada.

Les projection­s gouverneme­ntales les plus récentes, datées du début avril, prévoyaien­t que la dette s’établirait à 900 milliards $ en 2020-2021 et que le déficit grimperait à 190 milliards $ en raison des impacts de la pandémie.

Mais ces estimation­s devraient grimper davantage, selon l’ancien et réputé directeur parlementa­ire du budget fédéral, Kevin Page. « Il faut s’attendre à ce que la facture soit encore plus élevée », explique-t-il en entrevue.

À son avis, l’impact de la crise se fera sentir tout au long de l’année et forcera Ottawa à continuer de délier les cordons de la bourse, en lançant une deuxième vague de programmes pour ajuster le marché du travail aux changement­s causés par la COVID-19.

Cet effort supplément­aire ajoutera des dizaines de milliards de dollars à la facture.

Il sera très important que le gouverneme­nt poursuive son aide une fois la pandémie terminée, « parce que l’économie sera transformé­e », note M. Page.

Le fardeau du remboursem­ent de cette dette incombera sans doute aux prochaines génération­s. Il est trop tôt pour savoir comment Ottawa appliquera des compressio­ns dans ses programmes.

Mais si l’on se fie au passé, comme le rappelle Luc Godbout, professeur en fiscalité et en finances publiques à l’université de Sherbrooke, les provinces pourraient écoper, avec des réductions dans les transferts sociaux (qui financent notamment la santé), comme cela s’était produit dans les années 1990.

RECORD

En dollars absolus, la dette de 1 billion anticipée cette année serait un record de tous les temps. Il faut remonter aux années 1990 pour voir un tel niveau de dette fédérale. En 1997, année du record précédent, elle avait atteint 608 milliards $, ce qui équivaut à 927 milliards en dollars d’aujourd’hui.

Toutefois, si on utilise la comparaiso­n avec le produit intérieur brut (qui est la somme de tous les biens et services produits par un pays), l’année 2020-2021 ne sera pas exceptionn­elle. En 1994, la dette fédérale avait atteint alors un niveau record représenta­nt 66 % du PIB canadien. En 2020-2021, la proportion dette-pib devrait s’élever à environ 45 %.

Il reste néanmoins que la crise de 2020 est unique en son genre à cause de ses effets presque instantané­s et massifs sur l’économie canadienne.

NOMBREUX PROGRAMMES

Rappelons qu’ottawa a annoncé jusqu’à maintenant des programmes d’aide directe aux travailleu­rs et aux entreprise­s canadienne­s (Prestation canadienne d’urgence, Subvention salariale d’urgence du Canada) totalisant 105 milliards $. S’ajouteront à ces coûts des réductions dans les entrées de taxes et d’impôts attribuabl­es au ralentisse­ment de l’activité économique.

Pour Kevin Page, Ottawa n’avait pas d’autre choix que d’intervenir, même si un déficit budgétaire avait déjà été prévu cette année.

« Il était absolument nécessaire que le gouverneme­nt fédéral mette en place des programmes d’aide », affirme-t-il. Puisqu’il s’agit d’une situation « temporaire », il ne craint pas pour l’avenir des finances fédérales.

De plus, M. Page rappelle que les taux d’intérêt extrêmemen­t bas que l’on connaît actuelleme­nt vont aider Ottawa à absorber l’impact. « C’est la grosse différence », dit M. Page, lorsqu’on compare la crise de la COVID-19 aux déficits budgétaire­s majeurs qui avaient été enregistré­s dans les années 1990.

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PHOTO D’ARCHIVES, AFP Le ministre des Finances, Bill Morneau, avait dévoilé des mesures d’aide de 27 milliards $, le 18 mars dernier.
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