Le Journal de Quebec

Des adieux émouvants par vidéo

Un camionneur de Mirabel a contracté le virus alors qu’il était déjà hospitalis­é pour un problème aux poumons

- JONATHAN TREMBLAY

Après presque 44 ans de mariage, l’épouse d’un camionneur de la Rive-nord atteint de la COVID-19 a dû dire adieu à « l’homme de sa vie » en direct, par vidéoconfé­rence.

« C’est épouvantab­le, et cruel », souffle Florence Gratton, qui allait fêter son anniversai­re de mariage avec son mari Yves Labelle, le 15 mai.

M. Labelle, un camionneur de 65 ans à l’aube de sa retraite, a toutefois « effectué son dernier voyage », le 12 avril.

Il est vraisembla­blement le premier chauffeur de poids lourd du Québec à décéder des suites de la COVID-19.

À la mi-mars, le résident de Mirabel s’est rendu à l’hôpital pour faire traiter un pneumothor­ax.

DE MAL EN PIS

Durant sa convalesce­nce à l’hôpital du Sacré-coeur de Montréal, il a commencé à présenter des symptômes tels que la fièvre, rendant sa guérison difficile.

ACTUALITÉS­rus.

« Ç’allait de pire en pire, et on ne pouvait pas aller le voir, poursuit-elle. Mais le personnel a été super. »

Quelques instants avant le décès de M. Labelle, son fils Martin, également camionneur, et Mme Gratton ont pu lui dire un dernier adieu par vidéoconfé­rence.

Ceux-ci étaient chacun chez soi en confinemen­t, afin de respecter les règles d’éloignemen­t social.

SA CHANSON PRÉFÉRÉE

« Ç’a été très difficile, car il était dans le coma. On lui a mis sa chanson préférée, California­blue. Mon fils lui a lu une lettre qu’il lui avait écrite, se remémore Mme Gratton, la gorge nouée. Ç’a dû l’aider, car on a assisté à sa mort en direct… »

« Même l’infirmière pleurait ajoute-t-elle.

Depuis le jour où son mari a été admis à l’hôpital, la femme endeuillée n’a pas pu obtenir d’étreintes de réconfort.

« Ça fait 35 jours que je suis seule à la maison. Une chance qu’on a Facetime ! », s’exclame-t-elle. Ma fille Brigitte est infirmière. Elle est au front. Chaque jour, je demande qu’elle n’attrape pas le virus. »

« Et mes deux petites-filles de 3 et 6 ans, que mon mari appelait “ses petits coeurs”, sont venues me voir pour me consoler. Elles se sont arrêtées à 20 pieds de moi », continue-t-elle, évoquant toutefois l’aspect mignon de cette situation déchirante.

Puis, comme les services funéraires sont repoussés à des dates ultérieure­s durant la pandémie, Florence Gratton a tenu à rendre hommage différemme­nt à « l’homme de sa vie ».

UN DERNIER SALUT

« J’ai sorti son camion dans l’entrée, question de lui faire un dernier salut, ditelle. Des gens sont venus porter des fleurs, et nos petites-filles ont dessiné des coeurs et un arc-en-ciel au sol avec des craies. »

Sur les réseaux sociaux, de nombreux camionneur­s ont publié des photos de leurs véhicules, en soutien à la famille du défunt.

« Il était connu et aimé de tous, à Mirabel. Tout le monde a une anecdote avec lui. Il était souriant et avait bon coeur. Il dépannait toujours tout le monde avec le garage. Et il adorait son camion. C’était “le truck du boss” », conclut Mme Gratton.

 ?? PHOTOS COURTOISIE ?? Des citoyens ont déposé des fleurs sur le poids lourd d’yves Labelle, en sa mémoire, à Mirabel. On peut aussi apercevoir des coeurs dessinés au sol par ses deux petites-filles. En mortaise, l’homme de 65 ans est décédé de la COVID-19 le 12 avril.
PHOTOS COURTOISIE Des citoyens ont déposé des fleurs sur le poids lourd d’yves Labelle, en sa mémoire, à Mirabel. On peut aussi apercevoir des coeurs dessinés au sol par ses deux petites-filles. En mortaise, l’homme de 65 ans est décédé de la COVID-19 le 12 avril.

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