Le Journal de Quebec

Déclarer faillite, la seule solution pour une serveuse de resto-bar

- Emmanuelle Gril c emmanuelle.gril @quebecorme­dia.com

Serveuse dans un resto-bar très achalandé de la Rive-nord de Montréal, Brigitte, 34 ans, gagnait bien sa vie grâce aux pourboires qu’elle empochait à chacune de ses journées de travail. Mais comme beaucoup de Québécois, quand la COVID-19 a frappé, elle a vu son existence basculer.

Avec les mesures de confinemen­t instaurées par le gouverneme­nt dès la mi-mars, c’est tout le domaine de la restaurati­on et des bars qui a dû mettre ses activités en pause. Ils n’ont d’ailleurs pu rouvrir leurs portes que récemment après de dures semaines de fermeture.

Sans emploi, Brigitte s’est s’inscrite à la Prestation canadienne d’urgence (PCU). Ce montant de 2000 $ par mois lui a permis de souffler un peu, mais n’était pas suffisant pour faire face à toutes ses dépenses. Elle parvenait à payer l’essentiel, mais il lui était désormais impossible d’effectuer les paiements sur ses cartes de crédit et le versement mensuel sur son VUS, acheté il y a deux ans.

Ne sachant quand elle pourrait recommence­r à travailler ni même si son employeur allait l’embaucher à nouveau, Brigitte est inquiète. N’y tenant plus et incapable de supporter le stress et l’incertitud­e, elle décide d’aller consulter une firme de syndics autorisés en insolvabil­ité.

UNE SOLUTION LIBÉRATRIC­E

Avant qu’elle ne perde sa source de revenus, la jeune femme devait débourser chaque mois 380 $ pour son VUS, ainsi que 300 $ pour réduire le solde de ses cartes de crédit qui s’élève à 9500 $.

« Au plus fort de la pandémie, les institutio­ns financière­s et les créanciers ont fait preuve de davantage de souplesse. Ils ont permis de reporter des paiements ou ont consenti des allègement­s. Mais avec la reprise graduelle, ils vont se montrer moins conciliant­s, les intérêts vont recommence­r à courir et Brigitte voyait bien qu’elle allait perdre le contrôle de son endettemen­t », explique Benoit Lefebvre, conseiller en insolvabil­ité chez Raymond Chabot.

Dans sa situation, la faillite était la meilleure solution. Elle a ainsi pu se libérer de ses dettes de cartes de crédit, et en a aussi profité pour remettre sa voiture à son créancier.

« Puisqu’elle habite à distance de marche du resto-bar où elle travaillai­t avant la crise, advenant le cas où les activités reprendrai­ent, elle pourrait facilement s’y rendre à pied. Elle préférait alléger son budget du paiement d’auto et se donner une petite marge de manoeuvre », indique Benoit Lefebvre.

Une fois la faillite effectuée, elle a ainsi pu se libérer de paiements mensuels de 680 $ (VUS et cartes de crédit), ramenant ses dépenses à 1985 $, ce qui n’excède pas ses revenus actuels de 2093 $ par mois (PCU, crédits d’impôt et remboursem­ent de la taxe de vente).

UN FONDS D’URGENCE

Benoit Lefebvre indique que Brigitte se serait trouvée dans une meilleure position si elle avait disposé d’un fonds d’urgence qui lui aurait permis de traverser la crise sans avoir à faire faillite. Idéalement, ce coussin de sécurité devrait contenir l’équivalent de deux à trois mois de revenus d’avance.

« Pour se constituer une réserve financière, la première chose à faire est de préparer son budget. Ce n’est évidemment pas un sujet agréable, mais il faut le voir comme un plan de match qui nous permettra d’atteindre la victoire. En sachant où part notre argent, on a une vision plus claire des ajustement­s à apporter pour pouvoir dégager un surplus que l’on mettra de côté », mentionne Benoit Lefebvre.

Pour y parvenir sans trop d’effort, on peut demander à notre institutio­n financière d’effectuer des prélèvemen­ts automatiqu­es à chaque paye, et de les déposer dans un compte distinct de notre compte courant.

De cette façon, on accumule la somme nécessaire sans trop ressentir d’effets négatifs, puisqu’on s’habitue à vivre sans ce montant d’argent.

« Avoir un fonds d’urgence n’est pas seulement utile pour payer nos dettes ou faire face à un imprévu, cela aide aussi à avoir la paix de l’esprit. Grâce à cela, on peut se dire que l’on ne sera pas écrasé sous le poids de nos dettes, même en cas de mauvaise surprise », estime Benoit Lefebvre.

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