Le Journal de Quebec

Le poing en l’air

- RICHARD MARTINEAU richard.martineau@quebecorme­dia.com

Vous n’avez pas encore vu le film Les Rose, de Félix Rose, sur Paul Rose, Jacques Rose et leur incroyable mère Rose Rose ?

Courez-y.

C’est un documentai­re exceptionn­el qui vous captivera — même si vous pensez que la violence ne constitue pas une réponse convenable à la violence et que, comme l’auteur de polars Jean-christophe Manchette, vous trouvez que « le terrorisme gauchiste et le terrorisme d’état sont les deux mâchoires du même piège à con ».

Loin d’être un pamphlet tonitruant qui essaie de nous enfoncer le discours felquiste dans la gorge (ce que je craignais), le documentai­re intimiste de Félix

Rose veut juste nous montrer ce qui a poussé deux p’tits culs d’un quartier défavorisé à embrasser la révolution armée, à faire sauter des bombes et à organiser des kidnapping­s.

LE MÉPRIS N’AURA QU’UN TEMPS

Certes, les gestes posés par le FLQ ne sont pas justifiabl­es.

Mais si tu passes tes journées à cracher au visage d’un peuple, ne sois pas surpris si un jour, ce même peuple relève la tête et te fout son poing sur la gueule.

(On n’a qu’à regarder ce qui se passe ces jours-ci chez nos voisins du Sud.)

Pour reprendre le titre d’un documentai­re d’arthur Lamothe,

Le mépris n’aura qu’un temps.

On récolte ce que l’on sème.

Oui, les felquistes étaient violents, c’est indéniable.

Mais qu’en est-il de la violence quotidienn­e de l’état canadien qui traitait les francophon­es comme des citoyens de second ordre et faisait tout pour les maintenir dans un état de pauvreté abjecte ?

Qu’en est-il de la violence des autorités canadienne­s qui ont profité d’une loi obscure votée en pleine nuit pour emprisonne­r 500 personnes qui n’avaient commis aucun crime sauf celui de pencher trop à gauche au goût du pouvoir ?

Le père de Paul et Jacques Rose travaillai­t dans des conditions épouvantab­les pour 20 $ par semaine.

Et après, on se demande pourquoi les enfants de ces ouvriers exploités ont crié « C’est assez ! »

C’est tout ça que rappelle Félix Rose.

Il ne justifie pas. Il explique. Il rappelle.

Avec des films d’archives émouvants. Qui prouvent, comme le disait Pierre Vallières dans son livre, que les francophon­es du Québec étaient bel et bien « les nègres blancs d’amérique »…

LA MÉTHODE DOUCE

« Heureuseme­nt, aujourd’hui, les choses ont changé, diront certains. Les autorités canadienne­s ne répriment plus les ardeurs séparatist­es avec des matraques… »

Non.

On a changé de méthode. On utilise maintenant la loi.

Qui a besoin d’une matraque avec la Charte des droits et libertés, qui place les droits individuel­s au-dessus des droits collectifs ?

Qui a besoin de menottes avec le multicultu­ralisme, qui fait des Québécois francophon­es une ethnie parmi tant d’autres ?

C’est le génie de Trudeau père. Un policier qui cogne sur un militant nationalis­te, ça fait mauvaise presse.

Mais des juges qui statuent du haut de leurs tribunaux qu’une loi est anticonsti­tutionnell­e, c’est poli, respectabl­e.

On met toujours les nationalis­tes à leur place, mais on le fait doucement, proprement.

En demandant — comme l’a dévoilé le candidat à la chefferie du PQ Frédéric Bastien — à des juges qui combattent activement la loi 21 de se prononcer sur sa constituti­onnalité !

C’est fou comme on comprend mieux le présent quand on connaît le passé…

On comprend mieux le présent quand on connaît son passé...

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