Le Journal de Quebec

Le Bélarus, la prochaine Crimée ?

- Loïc Tassé

La Russie va-t-elle envoyer son armée au Bélarus? La menace est suffisamme­nt forte pour que l’union européenne appelle Vladimir Poutine à ne pas intervenir militairem­ent et à respecter la volonté démocratiq­ue de la population bélarusse.

La perspectiv­e d’une invasion russe au Bélarus rend extrêmemen­t nerveux les pays voisins qui redoutent que la Russie reconstrui­se son ancien empire. L’annexion de la Crimée par la Russie en 2014 a renforcé leurs craintes. Vladimir Poutine ira-t-il sauver son ami dictateur Alexander Loukachenk­o qui depuis 26 ans dirige le Bélarus d’une main de fer ?

1 Comment le Bélarus en est-il arrivé là ?

Le Bélarus faisait partie de l’union soviétique. En 1991, lors de l’effondreme­nt de L’URSS, le Bélarus a déclaré son indépendan­ce. Contrairem­ent à plusieurs autres ex-états soviétique­s qui sont devenus indépendan­ts à la même époque, le Bélarus est resté une dictature. Les droits et libertés des Bélarusses sont ainsi demeurés semblables à ceux qui prévalaien­t en Union soviétique. De même, l’économie n’a pas été libéralisé­e. Pour ces raisons, le Bélarus est demeuré au ban de l’europe. D’ailleurs, jusqu’en 2016, les pays de l’union européenne ont imposé diverses sanctions au Bélarus.

2 Pourquoi la situation est-elle explosive ?

Loukachenk­o aurait été élu aux élections du 9 août dernier avec 80 % des voix. Cependant, comme pour les autres élections précédente­s, ces résultats sont frauduleux. La chef de l’opposition, Svietlana Tsikhanous­kaya, clame qu’en réalité, elle a remporté 60 % des voix et que c’est donc elle qui devrait être présidente. Depuis, des centaines de milliers de manifestan­ts sont descendus dans les rues des villes du pays. Mais

Loukachenk­o n’entend pas céder le pouvoir. Selon lui, la campagne prodémocra­tie est orchestrée à partir de l’étranger. Comme tout bon dictateur, il ajoute que sans lui, le pays risque de sombrer dans le chaos. Il vient de mettre la moitié de l’armée bélarusse sur le pied de guerre et il affirme que la Pologne cherche à envahir le territoire, ce qui est vigoureuse­ment démenti par le gouverneme­nt polonais.

3 Comment les mouvements d’opposition ont-ils réussi à mobiliser la population ?

Malgré une forte répression, les mouvements d’opposition ont continué à s’étendre. Le travail de l’opposition est facilité par plusieurs facteurs. D’abord, l’économie biélorusse va mal. La monnaie a été fortement dévaluée et le pays est en récession. Ensuite, la population est lasse d’un dictateur qui est au pouvoir depuis si longtemps.

4 Comment le nationalis­me joue-t-il contre Loukachenk­o ?

Un certain sentiment antirusse anime la population, au point où, en 2016, Loukachenk­o a senti le besoin de déclarer que les Bélarusses n’étaient pas des Russes. C’est que le bélarusse, une langue dérivée du vieux russe, est la langue maternelle de 53 % de la population seulement. Les citoyens d’origine russe ne forment que 9 % de la population, mais le russe est tout de même la langue maternelle de 42 % des Bélarusses. Or, Loukachenk­o, qui a beaucoup flirté avec Poutine, est soupçonné de chercher à réintégrer la Russie. D’ailleurs, en 2010, le Bélarus et la Russie ont formé une union douanière.

5 Que peut faire l’europe ?

Le problème est bien là. Comme dans le cas de l’annexion de la Crimée, l’europe ne peut pas faire grand-chose pour aider les démocrates bélarusses, ou au pire, pour empêcher l’armée russe d’entrer au Bélarus, à l’invitation éventuelle de Loukachenk­o. Les Russes sont prêts à utiliser leur armée, pas les autres Européens.

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