Des risques pour l’institut de cardiologie
Les apparences de conflits d’intérêts impliquant la famille Desmarais, ses entreprises et l’institut de cardiologie de Montréal entraînent un risque pour la réputation de l’établissement, selon un chercheur.
« C’est le danger d’avoir un donateur trop fort. Parce que tu deviens sujet aux volontés de ce donateur, même non intentionnellement », dit le directeur des programmes de bioéthique de l’université de Montréal, Bryn Williams.
Selon lui, il faut un vrai mur pare-feu entre les grands donateurs et les directeurs d’hôpitaux pour éviter d’influencer la recherche.
Dans le cas de l’institut, l’expert estime qu’il y a un risque.
« On est dans un environnement où, à cause de ces liens d’intérêts et de proximité avec la direction, les chercheurs seniors et les donateurs, il y a un aveuglement des normes de bonne gouvernance et de gestion des conflits d’intérêts », dit-il.
L’UNIVERSITÉ DE TORONTO
Bryn Williams rappelle un cas célèbre survenu à l’université de Toronto, à qui la compagnie de médicaments Apotex avait promis un don record de 92 millions $.
Dans les années 1990, lorsqu’une chercheuse a découvert un risque durant les essais cliniques d’un médicament d’apotex, les responsables de l’université et de la compagnie ont tout fait pour étouffer ses découvertes.
L’affaire a eu des répercussions partout au Canada et même ailleurs dans le monde.
DÉCISIONS BIAISÉES PAR L’ARGENT
Pour le professeur Williams, le risque actuel, c’est que les décisions de l’institut de cardiologie soient « biaisées par l’argent ».
Il se questionne également sur le fait que le directeur du centre de recherche de l’institut de cardiologie, le Dr JeanClaude Tardif, ait refusé de répondre aux questions de notre Bureau d’enquête.
« Si tu refuses d’expliquer quels sont tes liens, même si tu n’as pas de lien, tu donnes l’impression que tu as quelque chose à cacher », selon lui.
Il juge aussi sévèrement les investissements du Dr Tardif dans un projet de recherche qu’il dirige.
Finalement, il s’interroge sur le rôle de chien de garde du comité d’éthique et de recherche (CER) de l’hôpital qui doit gérer les conflits d’intérêts potentiels.
« Ma recherche sur les CER et les conflits d’intérêts a démontré qu’ils sont très peu formés pour gérer des conflits d’intérêts. Ils ne vont pas nécessairement être en mesure de connaître qu’il y a des influences au niveau institutionnel, parce que ce n’est pas déclaré dans le protocole de recherche », conclut-il.