Le Journal de Quebec

Plus forts que les rivalités

Les droits de la personne au coeur des préoccupat­ions des joueurs

- JONATHAN BERNIER

Il fut une époque où il était mal vu d’adresser la parole à un adversaire en saison régulière. Imaginez le scandale pour ceux qui auraient osé le faire en séries éliminatoi­res. C’est pourtant ainsi qu’a germé tard mercredi soir et jeudi matin le mouvement ayant mené au report des matchs des deux derniers soirs dans la LNH. « On a commencé à en discuter entre coéquipier­s après notre match (mercredi soir). Par la suite, on a échangé des messages textes avec les joueurs du Lightning. Déjà des rencontres étaient prévues le lendemain », a expliqué Patrice Bergeron, hier après-midi, lors d’une visioconfé­rence.

Puis, le Québécois raconte qu’un appel a été lancé aux joueurs de l’associatio­n de l’ouest, séquestrés dans la bulle d’edmonton. Rapidement, Matt Dumba et Evander Kane, membres fondateurs de l’alliance pour le hockey diversifié, ont été inclus dans la discussion.

« On était une quarantain­e de joueurs (réunis à l’hôtel). C’était beau de voir que tout le monde était uni et se rendait compte qu’en ce moment, ça va plus loin que le sport. C’est à propos des droits de la personne et de l’égalité. On veut que tout le monde soit traité de la même façon », a témoigné l’attaquant de 35 ans.

Celui-ci n’en est pas à sa première implicatio­n dans des causes visant à lutter contre le racisme. En juin dernier, il a remis une somme de 25000 $ au Centre multiethni­que de Québec, dont le mandat est de soutenir les nouveaux arrivants, contribuer à leur intégratio­n et les aider à améliorer leurs conditions de vie.

LE SPORT, UN LUXE

Le hockeyeur originaire de L’ancienne-lorette a rejoint le propos de plusieurs de ses collègues de l’associatio­n des joueurs de la LNH en rappelant que le mouvement dans lequel ils sont impliqués transcende le monde du hockey.

Assis à ses côtés, Brad Marchand n’a pas hésité à rabrouer ceux, nombreux sur les médias sociaux, qui commandent aux sportifs de ne s’en tenir qu’aux sports.

« Tout le monde a droit à son opinion. Toutefois, le sport est un luxe. Un luxe de le jouer et un luxe de le regarder. La sécurité des gens, leur vie et le désir de voir tout le monde se sentir bien dans sa propre peau sont beaucoup plus importants, a martelé Marchand. Je comprends ceux qui veulent voir des matchs à la télé, mais il y a des choses plus importante­s qui nous tiennent à coeur et que nous souhaitons soutenir. »

D’ailleurs, Braydon Coburn, du Lightning, a gentiment contourné une question concernant le prochain match du Lightning, prévu ce midi.

« Aujourd’hui, assurons-nous de garder toute notre attention sur la cause », a-t-il poliment répondu.

ÉDUQUONS LES JEUNES

Évidemment, les joueurs sont conscients qu’il faut du temps pour faire évoluer les mentalités. La roue est difficile et lente à faire tourner. Si, au moins, cette pause de deux jours a permis de conscienti­ser des gens, ce sera déjà un pas de fait.

« Le problème ne sera pas réglé demain matin. Par contre, cette pause est le moment parfait pour s’asseoir et réfléchir. Pendant deux jours, les conversati­ons sur le sujet n’ont pas cessé. C’était l’objectif. Il faut continuer d’apprendre, poser des questions et tenter de s’améliorer. Faisons ce qu’il faut, soyons de bonnes personnes dans ce monde. Éduquons nos enfants de la bonne manière », a ajouté Luke Schenn, du Lightning.

Et concrèteme­nt, quelle est la suite ? À cette question, la meilleure réponse est venue de Barry Trotz.

« La prochaine étape est d’avoir un plan bien défini. On a la voix pour le faire, l’élan est de notre côté. S’il faut faire changer des lois, faisons-le. S’il faut faire comprendre aux jeunes dans nos écoles et à ceux de la prochaine génération ce qu’est l’amour et la compassion, faisons-le », a suggéré l’entraîneur des Islanders.

VIGNEAULT ABSENT

Sur les quatre équipes participan­t aux visioconfé­rences, trois ont rendu leur entraîneur disponible, Alain Vigneault étant l’exception. Il faut dire que l’entraîneur des Flyers n’a pas bien paru la veille, prétextant ne pas être au courant de ce qui se passe hors de la bulle.

Pourtant, à la lumière des propos recueillis auprès des joueurs de différente­s équipes, il semble que les premiers pas de cette grève aient été faits mercredi soir.

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Patrice Bergeron et Brad Marchand, des Bruins, ont plaidé pour l’égalité pour tous.

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