La politique n’est pas à sens unique
Donald Trump s’offusque que des athlètes professionnels se rebiffent et il leur reproche de faire de la politique.
Son gendre, Jared Kushner, jette son fiel sur les joueurs de basketball de la NBA en les blâmant pour leur ingratitude alors qu’ils sont bien nantis.
Pourtant, il y a plus de cent ans que les États-unis utilisent le sport pour faire de la politique et attiser la flamme patriotique avec l’hymne national au début des matchs.
N’est-il pas normal que ces athlètes professionnels longtemps utilisés pour aviver les sentiments patriotiques puissent maintenant se prononcer sur le pays qu’ils désirent ?
TRADITIONS ÉTATS-UNIENNES
L’hymne national chanté avant les matchs est un rituel typiquement états-unien qui a été importé au Canada dans la foulée des ligues professionnelles où évoluaient des équipes des deux pays.
Ailleurs dans le monde, cette tradition d’entonner l’hymne national avec les athlètes au garde-à-vous n’existe pas, à moins que l’événement sportif oppose deux équipes nationales représentant leur pays respectif.
Les Jeux olympiques et les championnats internationaux répondent à ces caractéristiques. On n’entendra toutefois pas les hymnes nationaux avant un match de football entre le Manchester City et le Paris Saint-germain !
Cette tradition états-unienne d’amorcer une rencontre sportive avec le « Star Spangled Banner » a surgi à la fin de la Première Guerre mondiale et s’est accentuée dans les années 1920 avec l’objectif évident de stimuler la fibre patriotique et de faire contrepoids à l’expansion du communisme.
Les athlètes professionnels se sont prêtés de bonne grâce à cet exercice patriotique durant presque un siècle.
En 2016, le joueur des 49ers de
San Francisco, Colin Kaepernick, a toutefois jeté un pavé dans la mare avec son refus de se lever pendant l’hymne national afin de protester contre le traitement réservé à ses compatriotes noirs.
Son exemple a été suivi dans les années subséquentes par de nombreux autres athlètes qui poussèrent la provocation jusqu’à déposer un genou à terre en guise de protestation.
Le comble a été atteint ces jours-ci avec le refus de participer à certains matchs éliminatoires dans la NBA et la LNH.
EXERCER SA CITOYENNETÉ
Paradoxalement, le moment consacré à l’apologie de la patrie en entonnant l’hymne national s’avère aujourd’hui l’opportunité pour plusieurs athlètes et autorités sportives de rejeter un pays qui se fonde sur le racisme et les inégalités sociales.
Les athlètes qui se rebutent pendant l’hymne national posent effectivement un geste politique. On peut en dire autant de ceux qui se levaient béatement pendant son interprétation.
Fidèle à lui-même, Donald Trump voudrait faire taire les athlètes rebelles en les vilipendant comme il le fait avec tous ceux dont la pensée diffère de la sienne.
Il est cependant loin d’être sûr qu’il parviendra à museler ces personnalités notoires qui redonnent de la vigueur à la démocratie et à la dignité humaine.
Les États-unis ont plus besoin de ces nouveaux héros que d’un Donald Trump pour retrouver leur grandeur !
Honni hier, l’athlète états-unien à genoux durant l’hymne national est maintenant un héros.