Enregistrement gênant pour le parti du maire de Laval
Un organisateur politique affirme qu’une conseillère municipale a remboursé ses contributions en argent
Une conseillère municipale de Laval vient de s’exclure du caucus du parti du maire Marc Demers, en lien avec un enregistrement embarrassant où elle est accusée de faire du financement illégal.
La conseillère de Sainte-rose, Virginie Dufour, jure toutefois qu’elle est innocente et demande au Directeur général des élections du Québec (DGEQ) et à la police de Laval de faire la lumière sur toute cette histoire.
Notre Bureau d’enquête a obtenu un enregistrement daté de juillet où on entend un organisateur du parti et proche de Virginie Dufour expliquer à sa conjointe comment la conseillère lui rembourse en argent comptant les dons qu’il effectue au parti (voir ci-contre).
Or, le recours à un prête-nom et le remboursement de contributions politiques, s’ils sont avérés, sont illégaux.
La Loi prévoit des amendes pouvant aller jusqu’à 20 000 $ ainsi que la perte des droits électoraux, tant pour le donateur que pour la personne qui rembourse le don.
Ce cas n’est pas sans rappeler l’ère de l’ex-maire de Laval Gilles Vaillancourt, condamné à six ans de prison en 2016 pour fraude, abus de confiance et complot. Selon le DGEQ, son parti, le PRO des Lavallois, est l’un des partis municipaux qui auraient le plus bénéficié de l’usage de prête-noms au fil des ans.
En 2015, sept ex-élus du PRO des Lavallois avaient d’ailleurs été sanctionnés par le DGEQ pour du financement illégal, dont l’ex-maire par intérim Alexandre Duplessis.
ALLÉGATIONS « SÉRIEUSES »
Nous avons remis lundi une copie de l’enregistrement au parti du maire Marc Demers, le Mouvement lavallois.
Le maire Demers a rencontré sa conseillère le jour même, et dit avoir eu avec elle « une discussion franche et honnête ».
« Les allégations formulées à l’endroit de Virginie Dufour sont sérieuses et, si elles s’avèrent fondées, inacceptables », a-t-il commenté.
Nous avons aussi joint les deux personnes que l’on peut entendre sur l’enregistrement, soit l’organisateur politique Normand Cusson et sa conjointe.
IL DIT QU’IL MENTAIT
M. Cusson, qui a indiqué être un ami de longue date de la conseillère Dufour, s’est défendu en indiquant qu’il mentait à sa conjointe lorsqu’il a affirmé que Mme Dufour avait remboursé ses dons.
Il a dit avoir agi ainsi pour « avoir la paix » vis-à-vis sa conjointe, qui lui reprocherait sa trop grande implication politique auprès de Virginie Dufour.
« Oui, j’ai dit qu’elle me remboursait les montants. [...] Je ne voulais pas qu’elle m’écoeure avec ça en disant : “t’as pas d’affaire à donner de l’argent, avec tous les services que tu lui rends” », nous a-t-il indiqué.
Propriétaire d’une entreprise (Radio Transport 2000), d’une radio locale dans Sainte-rose et organisateur d’événements, M. Cusson a été entre autres le directeur de campagne électorale de Virginie Dufour en 2013. Il est encore proche de la conseillère à ce jour, selon nos informations.
« La seule chose que je peux dire, c’est qu’il n’y a jamais rien qui a été remboursé. Virginie ne m’a jamais rien remboursé, jamais », nous a dit M. Cusson.
Sa conjointe a une autre version des faits. Elle nous a affirmé que Mme Dufour avait demandé à M. Cusson de la solliciter pour un don de 100 $ à deux reprises, en 2018 et 2019, en échange d’un remboursement. Elle aurait toutefois refusé de participer au stratagème.
Selon les registres du Mouvement lavallois et du DGEQ, M. Cusson a versé trois dons au Mouvement lavallois au cours des dernières années ; en 2018 (100 $), en 2019 (200 $) et en 2020 (100 $).
LA CONSEILLÈRE NIE TOUT
La conseillère Virginie Dufour, qui siégeait aussi au comité exécutif de la Ville de Laval, nous a fait parvenir la déclaration suivante :
« J’ai une éthique de travail sans faille et je n’ai absolument rien à cacher. Au contraire, je tiens à ce que la lumière soit faite ! C’est pourquoi j’ai moi-même pris les devants en demandant une enquête des autorités compétentes à mon sujet ».
Elle compte oeuvrer à « rétablir sa réputation » au cours des prochaines semaines.
Le Mouvement lavallois, qui a octroyé « ponctuellement » des contrats à M. Cusson au fil des dernières années, a indiqué ne pas avoir pris de décision quant à son embauche pour les prochaines élections.
- Avec la collaboration de Marie Christine Trottier et de Andrea Valeria
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