Les chasseurs et le gibier
C’est bientôt la pause parlementaire à Québec et à Ottawa. J’ai une pensée pour mes anciens collègues en cette année de crise sanitaire. Ils ne l’ont pas eu facile, eux non plus.
« Député » est un rôle généralement mal connu du grand public. Il a souvent été circonscrit au seul indicateur qu’est la « période des questions » à l’assemblée nationale ou à la Chambre des communes. C’est très réducteur.
La période des questions et réponses orales est, certes, l’une des vitrines illustrant les député(e)s en action, mais elle est aussi la moins productive et la plus insignifiante.
UNE PARTIE DE CHASSE
J’ai été dans les souliers de député au sein de deux parlements. Et la période des questions est le volet que j’ai le moins aimé. Elle accentue la partisanerie et les clivages. Pour faire image, c’est une partie de chasse qui dure 45 minutes. Avec d’un côté les « chasseurs » (les partis d’opposition) et de l’autre, le « gibier » (le gouvernement).
Pour l’opposition qui rêve de prendre la place du « gibier », il s’agit de faire le plus de dégâts possible sur les banquettes du gouvernement pour le faire mal paraître. Ce dernier doit se défendre tant bien que mal pour gagner sa journée ou sa semaine.
Cette vitrine n’est pas un lieu apaisé. Il n’y a rien de constructif là-dedans. Elle offre une fausse image de la politique et fourvoie les citoyens relativement à sa véritable épaisseur.
C’est malheureusement la vitrine la plus médiatisée, car elle présente un « spectacle ».
L’EXEMPLE VIENT D’EN HAUT
Conséquemment, la « période des questions » dans sa présente facture façonne et aiguise les biais politiques de plusieurs de nos concitoyennes et de nos concitoyens. Le niveau d’agressivité et d’incivilité qui s’en dégage inspire et légitime leurs propres paradigmes de règlement de différends dans la vie de tous les jours.
Aussi, il est impolitique de voir certains « experts » en sciences politiques s’y référer et s’y limiter pour attribuer des mentions ou des notes aux « chasseurs » et au « gibier ». Ils révèlent leur « goût du sang »…
Le rôle du député mériterait qu’on le valorise à partir des vitrines plus fidèles à sa réelle dimension.
LES DIMENSIONS FONDAMENTALES
Le travail des député(e)s consiste principalement à assurer de l’aide, du soutien et très souvent de l’écoute aux femmes, aux hommes et aux familles de leurs circonscriptions respectives. À être des intermédiaires et des médiateurs entre eux et l’état.
À l’assemblée ou au Parlement, en commission ou en comité parlementaire, leur principale activité est d’étudier, d’analyser et de voter des projets de loi. Ils y contrôlent également l’action gouvernementale avec de multiples moyens mis à leur disposition.
Malheureusement, ces dimensions qui correspondent pourtant aux composantes fondamentales de leur travail sont largement occultées par les médias. Pas assez sensationnelles.