Attention, les paiements étalés créent une illusion de petits prix
« Pourquoi cracher 200 $ maintenant si vous pouvez payer 16,67 $ par mois durant un an ? » Ce n’est pas tout à fait comme ça que c’était écrit, mais c’est un peu ce que ça voulait dire.
Il y a déjà un moment que j’ai vu cette affiche d’une boutique de vêtements, dans un centre commercial. Je l’ai en photo.
L’image faisait chic comme si elle s’adressait à une dame d’outremont, mais l’offre de vente à tempérament qui lui était superposée enlevait du lustre au message : financement de 12 mois sans intérêt pour des achats de 200 $ à 499 $, et de 24 mois si la facture atteint 500 $ et plus… Vous ne réglez pas à temps Madame ? Bang ! Les intérêts de 19,95 % vous sautent dessus !
Rien de nouveau là, sinon qu’une forme de marketing jusque là réservée à des biens plus coûteux se répand désormais aux achats les plus insignifiants. Ajoutez à cela les services de divertissement par abonnement qui se multiplient, et on se retrouve avec une série de petites ponctions mensuelles qui finissent par gruger l’essentiel du compte de banque, et plus parfois, sans qu’on s’en aperçoive.
Le danger, c’est que ça crée l’illusion que tout est à portée de nos moyens. C’est le but d’ailleurs.
DES GROS PRIX HACHÉS PETITS
Les maîtres de la discipline proviennent de l’industrie automobile, ils ont su raffiner la méthode.
Après avoir longtemps été présenté sous la forme de mensualités, le prix des voitures a ensuite été affiché en paiements bimensuels, puis hebdomadaires. Réparti sur des périodes d’amortissement toujours plus longues, le financement crée l’impression que des véhicules plus chers sont de plus en plus abordables.
Les commerces de meubles et de piscine ont puisé dans le même livre. Leur travail consiste à vendre, on ne leur en voudra pas, et l’approche marketing utilisée est d’une efficacité redoutable. Une piscine à 17 000 $ ? Pas les moyens ! Une piscine à 125 $ par mois pendant 180 mois ? Oh ! La bonne affaire !
On finira tout de même par la payer, la piscine, et plus encore avec les intérêts, l’entretien, le chlore, le fongicide et tous les jouets flottants ! On sera vite tentés d’ajouter de nouveaux paiements aussi longtemps qu’il y a de la place ; pourquoi pas un mobilier de jardin acheté pour aussi peu que l’équivalent d’un abonnement familial au service de communications cellulaires, durant trois ans ?
On finit par atteindre un point de saturation, là où les revenus finissent par être entièrement monopolisés par une multitude de petits paiements.
Tout ce qui s’ajoute par la suite fait apparaître et gonfler une dette. Il suffit ensuite qu’un seul imprévu se produise pour tout faire dérailler, que des intérêts se déclenchent, et qu’on se retrouve en difficulté, incapable d’honorer tous ses engagements, incluant le paiement de ce manteau à 200 $ acquis à tempérament.
Pourquoi ça ? Parce qu’on n’a plus aucune idée du prix véritable des choses qu’on achète.