Le Journal de Quebec

« Je ne serais pas là à vous parler »

Après l’avoir critiqué lors de son introducti­on, Romain Grosjean reconnaît aujourd’hui la nécessité de l’arceau de sécurité

- Louis Butcher l Lbutcherjd­m

Si le halo avait été introduit en 2014, Jules Bianci, dernier pilote à avoir perdu la vie en F1, aurait sans doute survécu à son accident au Grand Prix du Japon. Et sans cette protection au-dessus de la tête, son compatriot­e Romain Grosjean ne serait plus de ce monde aujourd’hui.

Ceux qui ont visionné en direct le départ du Grand Prix de Bahreïn ont tous cru que le pilote français ne sortirait jamais vivant de cette embardée terrifiant­e au premier tour. Une scène qui nous a rappelé les visions d’honneur du passé en F1, à une époque où les pilotes roulaient à tombeau ouvert.

Quand le halo été inauguré en 2018, les puristes l’ont décrié en prétextant que ce dispositif de sécurité dénaturait la F1 et qu’il éliminait la part de risques de piloter les voitures de course les plus sophistiqu­ées sur la planète. Certains pilotes, dont Grosjean, l’ont même critiqué parce qu’il nuisait notamment à la visibilité.

Or, force est d’admettre que le halo a évité une tragédie hier. Grosjean est un miraculé.

Jamais il ne se serait lui-même extirpé de son bolide en flammes. Et on imagine mal comment il aurait pu s’en sortir s’il avait perdu connaissan­ce après cet impact horrible qui a coupé sa voiture en deux.

La scène était surréelle. Au milieu du brasier, sans sa chaussure gauche et la visière de son casque fondue, on le voit, évidemment secoué, sauter la clôture de métal – ces glissières de sécurité qui n’ont pourtant plus leur place en F1 – avant que des secouriste­s ne viennent à sa rescousse.

MESSAGE RASSURANT

Sur son lit d’hôpital, le pilote de 34 ans, qui perdra son volant chez Haas à la fin de la saison, s’est fait rassurant. Souriant, malgré ses deux mains recouverte­s de bandages pour soigner des brûlures, on le voit s’adresser à ses fans.

« Bonjour, tout le monde, je veux juste vous dire que je vais bien, ou presque... bien, a-t-il dit. J’avoue que je n’étais pas en faveur du halo il y a quelques années. Mais je reconnais que sans lui, je ne serais pas là à vous parler.

« Je tiens à remercier le personnel médical ainsi que les travailleu­rs de piste qui sont intervenus après l’accident. »

MÉTIER DANGEREUX

Après la course, tous les pilotes ont été unanimes dans leurs commentair­es en répétant qu’ils exercent un métier dangereux. Que le risque zéro n’existe pas en course automobile.

« Cet accident est un rappel que notre vie ne tient qu’à un fil chaque fois qu’on prend place à bord de voitures aussi rapides, a avoué Lewis Hamilton, vainqueur de cette course animée. Le danger est omniprésen­t.

« Rien n’est acquis, a-t-il renchéri. Fort heureuseme­nt, Romain doit sa vie aux normes très sévères qui ont été imposées ces dernières années pour renforcer la sécurité. »

Chaque fois que les pilotes prennent place dans leur monoplace, ils s’exposent à la mort. Ce que la plupart des 20 engagés ont tôt fait de souligner à l’issue de cette épreuve mouvementé­e.

« Quand on a vu les images, on a été tous secoués, a raconté le pilote espagnol Carlos Sainz. Pendant quelques secondes, on a cru le pire. Heureuseme­nt, le pire a été justement évité. On risque notre vie à tous moments.

« J’espère aussi que tous ceux qui ont critiqué le halo en affirmant que c’était très laid, vont ravaler leurs paroles. Il a sauvé la vie de Romain. »

LEÇONS À TIRER

Directeur sportif de la F1, Ross Brawn n’a évidemment pas aimé ce qu’il a vécu à Bahreïn hier.

« On pensait que ce genre d’accidents ne se reproduisa­it plus dans notre sport, a-t-il relaté en entrevue au réseau britanniqu­e Sky Sports. En fait, ça n’aurait jamais dû arriver.

« On doit étudier les faits pour éviter qu’un accident ne se répète, c’est certain. Pourquoi la voiture de Romain a-t-elle pris feu de cette façon? s’est-il interrogé. Il y a longtemps qu’on avait vu pareille scène en F1.

« Il faut aussi revoir l’utilisatio­n des glissières de sécurité à cet endroit. On a des leçons à tirer de cette catastroph­e évitée. »

La Fédération internatio­nale de l’automobile (FIA) va récupérer toutes les pièces de la voiture de Grosjean pour mener son enquête sur les causes de l’accident.

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PHOTO AFP Malgré la sévérité de l’impact et l’incendie qui s’en est suivi, la cellule de survie de la voiture de Romain Grosjean a permis au pilote français de sortir presque indemne de l’accident.
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