Pandémie et politique 101
Le premier ministre canadien Justin Trudeau fourbit ses armes électorales. Les libéraux sont minoritaires. Au printemps, la tentation de déclencher des élections sera forte. Objectif : tenter de rafler un troisième mandat, celui-là majoritaire.
Tout au long de la pandémie, Justin Trudeau, il faut le dire, a bien joué ses cartes. Il a fait ce qu’il fallait : dépenser massivement. La priorité étant de soutenir les gens et une économie happée durement par la pandémie.
Le premier énoncé économique de la ministre des Finances, Chrystia Freeland, est à l’avenant. Le déficit de 382 milliards de dollars frappe l’imaginaire, mais il est inévitable.
COVID-19 oblige, la plupart des États occidentaux sont dans le rouge foncé. Partout, les déficits et les dettes grimpent. Un jour, puisqu’ils ont aussi les reins financiers bien plus solides qu’on ne le pense, les États s’en remettront.
Justin Trudeau n’a donc pas à pâlir de gêne pour son déficit. Faire autrement eut été complètement irresponsable. Par la bande, ses multiples annonces depuis des mois contribuent même à solidifier l’option fédéraliste au Québec.
En pleine crise sanitaire, combien de Québécois verront de plus en plus le palier fédéral comme un pourvoyeur indispensable de soutien financier ?
VACCINATION : ÇA PRESSE
D’autres écueils attendent néanmoins Justin Trudeau, dont la vaccination tant attendue contre la COVID-19. Il se vante d’avoir le « porte-folio » de vaccins le plus fourni au monde. Le moment où il l’ouvrira pour en assurer la distribution est toutefois ce qui comptera pour les électeurs.
Une majorité de Canadiens, dit-il, serait vaccinée d’ici l’automne. La date de départ de la vaccination, selon lui, compte moins que celle du fil d’arrivée. Or, dès que les Canadiens verront d’autres populations se faire vacciner aussi tôt que ce mois-ci, la date d’arrivée ne comptera plus pour grand-chose.
La raison est simple. L’usure de la pandémie fait des ravages sur plusieurs plans. La COVID-19 tue. Au Québec, on dépasse les 7000 morts. Le temps court.
Un autre écueil pour Justin Trudeau se nomme François Legault. Devant la volonté insistante du premier ministre canadien de « négocier » des normes nationales avec les provinces pour les soins de longue durée, le premier ministre du Québec ne décolère pas.
COLLISION FRONTALE
La santé est de juridiction provinciale. Pour M. Legault, c’est « pas touche », sinon la collision politique sera frontale. D’autant plus que l’intention de M. Trudeau est un rappel brutal du fiasco de la « gestion » de la pandémie dans les CHSLD du Québec durant la première vague.
L’urgence, la vraie, est ailleurs. Sans une augmentation substantielle des transferts fédéraux, la « discussion » souhaitée par M. Trudeau est vouée à l’échec.
Bref, le Québec s’annonce comme un terrain de chasse important pour les partis fédéraux. La résurrection du Bloc québécois sous Yves-françois Blanchet complique en effet la vie pour le PLC, le PCC et le NPD.
D’où la conversion soudaine des libéraux et de Justin Trudeau à la thèse du « déclin » du français au Québec. Comme quoi, pour un gouvernement minoritaire, le doux parfum des isoloirs de la Belle Province peut provoquer de bien étranges virages.