Le Journal de Quebec

Le tabou du mot en « s »

- JOSÉE LEGAULT e Blogueuse au Journal Politologu­e, auteure, chroniqueu­se politique c josee.legault @quebecorme­dia.com L @joseelegau­lt

François Legault a choisi son ministre responsabl­e de la Lutte contre le racisme. Une première au Québec. Benoit Charette, ministre de l’environnem­ent, hérite ainsi d’un mandat des plus délicats.

La nomination d’un homme « blanc » étonne en effet. Il plaide cependant son intérêt de longue date pour les relations intercultu­relles. Sa conjointe est aussi d’origine haïtienne. Ce qui, dit-il, lui a donné l’occasion de voir sa propre famille victime de racisme.

Pour tout ministre, la chance va bien entendu au coureur. Le premier ministre, refusant de reconnaîtr­e l’existence d’un racisme « systémique », lui demande néanmoins de poser des « gestes concrets » pour « faire reculer le racisme au Québec ».

ENDÉMIQUE

La qualité de la performanc­e de Benoit Charette s’y mesurera sans nul doute. Entre autres dossiers chauds, agira-t-il clairement contre le profilage racial au sein des forces policières – une pratique endémique et hyper documentée ?

Travailler­a-t-il aussi en tandem avec Ian Lafrenière, le très efficace ministre responsabl­e des Affaires autochtone­s ? Tant en ce qui concerne la mort atroce de Joyce Echaquan sous des insultes racistes que sur moult épisodes choquants de profilage racial, les deux ministres auraient beaucoup à faire pour redresser ce qui, de part et d’autre, a des airs patents de racisme systémique.

LE MOT EN « A »

Pour ne pas hérisser son électorat, le premier ministre réduit le mot en « s » à une question de débat « sémantique ». Le Québec, répète-t-il, étant une société particuliè­rement accueillan­te. Ce qui est très vrai.

Il n’en reste pas moins que le Québec n’est pas une île. Pour de nombreux Québécois, de toutes origines, l’existence d’une discrimina­tion de nature plus systémique, ici comme ailleurs en Occident, est bien réelle. Certains la vivent, d’autres en sont témoins.

Attendre que M. Legault se résigne à accepter le mot en « s » est toutefois bien inutile. De toute évidence, cela ne se produira pas. Mieux vaudra alors le prendre au mot en « a » – actions –, celles qu’il promet de livrer. Là-dessus, il n’y aura rien de sémantique.

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