De chicane de quartier en conflit historique
Tous ceux qui ont à coeur la paix dans le monde – et même ceux qui veulent simplement avoir la paix tout court – se tournent vers Israël et serrent les dents encore une fois. Jérusalem est secouée par la violence et, naturellement, personne ne voit ou ne veut voir de compromis.
Imaginez le Moyen-orient comme un ensemble de cercles concentriques. Il y a la région au grand complet avec ses dictateurs, son surarmement et la rivalité perpétuelle entre Iraniens et Saoudiens. On resserre un peu et le conflit entre Israéliens et Palestiniens prend toute la place.
On zoome un peu plus et on en arrive à Jérusalem, la mère de toutes les discordes au cours des décennies de processus de paix. Ce n’est pas encore assez. Plissez les yeux et vous tomberez sur le quartier de Sheikh Jarrah : des Juifs veulent chasser quelques familles arabes et c’est l’attention du monde qui est recaptivée.
Sheikh Jarrah se trouve tout juste au nord de la vieille ville de Jérusalem. Là, six familles arabes risquent l’éviction de logements qu’elles habitent, dans certains cas, depuis le début des années 50.
Il serait trop long de décrire, depuis l’empire ottoman, quoi appartient à qui dans ce quartier qui est notamment passé d’occupation jordanienne à occupation israélienne il y a une cinquantaine d’années.
UNE INTERMINABLE QUERELLE IMMOBILIÈRE
Des Juifs soutiennent que les immeubles visés, achetés à la fin du 19e siècle, leur appartiennent légalement. Les familles palestiniennes répondent qu’elles ont dû s’y reloger après avoir fui ou avoir été expulsées de leurs maisons à Jérusalem-ouest et ailleurs en Israël pendant les affrontements entourant la création de l’état hébreu, en 1948.
La Cour suprême israélienne doit trancher en début de semaine prochaine. Les Palestiniens n’en espèrent rien de bon, eux qui perçoivent ces efforts de bannissement et les restrictions à leur capacité d’élargir leurs propriétés à Jérusalem comme parties d’une grande volonté de les chasser de la Ville sainte.
Ils crient à l’injustice devant un système légal qui accorde aux Juifs le droit de reprendre possession de propriétés perdues en 1948, mais qui refuse le même droit aux 700 000 Palestiniens qui ont dû quitter les leurs au cours du même conflit.
UN RISQUE D’EMBALLEMENT
La frustration des Palestiniens ne tient pas qu’à l’attitude d’israël. Après plus de quinze années au pouvoir, Mahmoud Abbas, le président de l’autorité palestinienne, avait annoncé la tenue d’élections parlementaires pour ce mois-ci, suivies d’une élection présidentielle en juillet.
Accusant les Israéliens d’empêcher les Palestiniens de Jérusalem-est de participer au scrutin, Abbas a reporté une nouvelle fois le rendez-vous électoral. Comme pour tout dans la région, la réalité est plus complexe. Fatah, le parti de Mahmoud Abbas, est tordu par les divisions, alors que Hamas, plus radical et déjà en contrôle de la Bande de Gaza, se dirigeait vers des gains en Cisjordanie.
La violence des derniers jours ne se limite pas qu’à Jérusalem. Des Palestiniens ont ouvert le feu vendredi contre une base militaire israélienne près de Jénine, en Cisjordanie, alors que plus tôt cette semaine, deux adolescents, un Juif et un Palestinien, étaient tués dans des incidents séparés.
Il y a matière à être inquiet. On sait à peu près dans cette région quand tout commence, mais on ne sait jamais trop quand et comment tout va se terminer.