Suivre la parade…
Il y a une époque où le Canada menait la charge pour la justice et la solidarité dans le monde. On peut penser au combat contre l’apartheid en Afrique du Sud, au traité contre les mines antipersonnel.
La COVID-19 offrait une chance en or au premier ministre Trudeau de redorer le leadership canadien sur la scène internationale. N’a-t-il pas plaidé l’été dernier que « là où vous vivez ne devrait pas déterminer si vous pouvez être en vie » ?
Or, sur le plus important enjeu de l’heure, l’accès mondial aux vaccins, le Canada est condamné à suivre la parade.
INÉGAUX FACE AUX VACCINS
Les vaccins se sont révélés la seule arme efficace contre la pandémie. À tel point que c’est devenu un refrain d’entendre les dirigeants répéter que « cette pandémie ne finira nulle part, si elle ne finit pas partout ».
Or, la recette est contrôlée par une poignée de géants pharmaceutiques.
Pourquoi ne pas les forcer à temporairement renoncer à leurs brevets, permettant ainsi la production massive de vaccins génériques ?
La décision des États-unis cette semaine d’appuyer cette idée a donné espoir aux pays pauvres et en développement de voir enfin l’organisation mondiale du commerce forger un consensus autour de la question.
Le problème, c’est qu’on demeure loin du compte. Inutile de dire que les Pfizer et Moderna de ce monde, ainsi que les grands pays producteurs, dont l’allemagne, s’y opposent.
Et le Canada ? Il demeure cruellement sur la clôture, malgré la pression des députés de tous les partis, incluant le sien.
Dans le débat sur l’accès mondial aux vaccins, le Canada est condamné à suivre la parade.
MANQUE DE COURAGE OU REALPOLITIK ?
C’est clair, l’iniquité mondiale dans l’accès aux vaccins pose un risque à notre propre reprise. Après l’inde, quel autre pays sera balayé par une flambée fulgurante de cas et de nouveaux variants ?
Or, il n’est pas simple pour le gouvernement Trudeau de trancher.
Peut-on vraiment s’imaginer que les doses libératrices qui nous arrivent par millions seraient au rendez-vous si le Canada était parti en croisade contre les géants pharmaceutiques ?
Renonceriez-vous à un bel été déconfiné pour le bien de nos congénères africains ?
D’ailleurs, sans la promesse de profits, ces pharmaceutiques auraient-elles investi les milliards en recherche pour produire ces vaccins en un temps record ?
Donc l’enjeu, ici, n’est pas que le gouvernement Trudeau ne soit pas un champion de la suspension des brevets, mais plutôt qu’il peine à expliquer clairement aux Canadiens quel compromis il propose pour réduire cette fracture dangereuse entre les pays riches et les autres.