Une tape dans le dos pour les artisans de l’information
Au front pour nous informer des développements de la pandémie depuis maintenant près de 15 mois, oeuvrant dans des conditions parfois difficiles et voyant souvent leur travail remis en question sans réels fondements, les artisans de l’information et des affaires publiques nommés au Gala Artis de ce soir méritent plus que jamais leur tape dans le dos. Cinq d’entre eux s’ouvrent sur l’année tumultueuse qu’ils ont vécue au travail. PIERRE BRUNEAU Combler un besoin
√ Animateur/animatrice de bulletins de nouvelles ( TVA Nouvelles)
Si Pierre Bruneau était marié avec le public québécois, l’alliance célébrerait aujourd’hui ses noces de topaze. C’està-dire que le bien-aimé chef d’antenne de TVA en est à sa 44e nomination au Gala Artis. Lui-même ne les compte plus, mais il se dit toujours aussi flatté par l’attention.
« Je pense que le public nous a été plus fidèle que jamais, confie-t-il. Je suis particulièrement fier du travail que toute notre équipe a fait pendant cette période de pandémie. Je constate que la constance est demeurée la même : le public est resté, parce qu’il a besoin de cette information. On comble un besoin. Pour moi, c’est la chose la plus importante dans mon métier. On est là pour informer, rassurer ; moi, c’est ma job, d’être cette espèce de filtre entre les événements et le téléspectateur. »
S’il estime qu’il en a « plus derrière que devant », Pierre Bruneau ne songe pas à la retraite pour autant. Et que souhaite l’homme à l’industrie de l’information, en constante mouvance et qui traverse actuellement des temps houleux ?
« Je souhaite de toujours avoir du plaisir dans ce que je fais, et de conserver cette stabilité, cette crédibilité, cette rigueur. Il n’y a pas 100 000 façons de faire de l’information. Je trouve que la compétition nous emmène toujours plus loin, mais quand on dit qu’on va tout réinventer et refaire, que les médias traditionnels nous ont déçus, et que d’autres vont faire différemment… En bout de ligne, ce n’est pas vrai ! Des faits existent, des sujets préoccupent, et il faut qu’on soit sur la nouvelle, tous les jours. On ne peut pas tout révolutionner en 12 heures. »
CÉLINE GALIPEAU « Il faut continuer »
√ Animateur/animatrice de bulletins de nouvelles ( Le Téléjournal)
Chaque printemps, une nomination au Gala Artis arrive comme un cadeau pour Céline Galipeau, qui ne tient rien pour acquis après bientôt une quinzaine de mentions à l’événement. Particulièrement cette année, alors que le boulot n’a pas été facile, reconnaît-elle.
« Comme journalistes, il y a quelque chose de très motivant, parce qu’on a l’impression d’être plus utiles que jamais, mais on est aussi humains, et comme tout le monde, on est affectés par ce qui se passe.
« Il y a eu des hauts et des bas, continue la dame. Ç’a été extrêmement dur au début, il a fallu se réadapter et changer toutes nos façons de faire. Ensuite, pendant l’été, on se disait que ça allait mieux, puis la deuxième vague est arrivée. Après, la lassitude fait que ça devient encore plus difficile. Donc, cette nomination, c’est comme si le public nous disait de continuer parce qu’il apprécie ce qu’on fait, et ça fait encore plus plaisir. »
Oui, le mandat d’informer comporte son lot d’aléas. Mais Céline Galipeau n’en est pas à un « faites vos recherches » près, et la COVID-19 est loin d’avoir éteint sa flamme pour sa profession.
« C’est une période vraiment intéressante et particulière, ce qu’on vit. Il faut continuer. Je l’ai fait à l’étranger, quand je couvrais de grosses crises, et jamais je ne me sentais interpellée autant personnellement. »
MARIO DUMONT Une information cruciale
√ Animateur/animatrice d’émissions d’affaires publiques ( Mario Dumont)
Parmi tous les rôles que Mario Dumont et ses collègues ont dû endosser cette année, celui qui vient spontanément à l’esprit de ce dernier est celui de « garder le débat public civilisé ».
« Ç’a beaucoup attisé les passions. Une partie de la population a décroché de tout et n’est pas encore sûre qu’il y a une pandémie. Rarement a-t-on eu autant d’information cruciale à donner aux gens. La pandémie a affecté le quotidien d’une façon énorme et directe. »
L’homme est très lucide devant les phénomènes qui secouent présentement son milieu, de la désinformation aux réactions hostiles devant les journalistes. Il établit un lien direct entre la prolifération de fausses nouvelles et l’ère Trump, mais perçoit aussi dans ces vagues de protestations des réactions humaines naturelles.
« Les médias doivent se regarder dans le miroir. Il y a le défi de rester connecté sur ce que vit la population. Mais ç’a toujours été le cas dans l’histoire de l’humanité : dans les périodes très difficiles à vivre, certains nient la réalité. On aimerait tous mieux qu’il n’y en ait pas, de pandémie ! C’est une tentation naturelle, et les réseaux sociaux exacerbent ça. Mais, dans toutes les grandes crises, il y a eu des théories du complot », explique-t-il.
DENIS LÉVESQUE Tanné du virtuel
√ Animateur/animatrice d’émissions d’affaires publiques ( Denis Lévesque)
En cet épisode trouble qu’ont traversé le Québec et le monde avec la crise sanitaire, Denis Lévesque a souvent senti le moral des troupes s’affaisser et a tenu, à son émission, à privilégier la présence d’intervenants porteurs d’espoir, comme le docteur Richard Béliveau. Surtout, il voulait tendre le micro à des personnalités crédibles, aux connaissances éprouvées.
« Tout le monde est devenu microbiologiste, tout le monde a l’impression qu’il connaît tout sur les vaccins, ironise le communicateur. Mais les gens qui pitonnent sur internet, personne n’a un doctorat, là-dedans… »
Denis Lévesque ne cache pas avoir dû s’ajuster en début de pandémie en resserrant son angle d’approche autour de la COVID-19. Comme d’autres, il a multiplié les entrevues virtuelles… un mode d’échange qu’il avoue avoir bien hâte de mettre de côté.
« J’ai hâte que ça soit fini et de retrouver mes repères, mes paramètres à moi, qui me permettent de parler de tout. »
CHARLES TISSEYRE Une année d’intensité
√ Animateur/animatrice d’émissions d’affaires publiques ( Découverte)
Toujours très touché d’être cité au Gala Artis, et après avoir ramené le trophée chez lui à quatre reprises, Charles Tisseyre mentionne que 2020 fut la première fois dans sa carrière où il a suivi « un seul dossier, aussi intensément, pendant plus d’un an ».
« Quand je dis intensément, c’était vraiment ça, siffle l’homme de 71 ans. C’était du sept jours par semaine, au moins 10 ou 12 heures par jour, au moins jusqu’à la fin de la première vague, l’été dernier. Et ç’a recommencé à l’automne, avec la deuxième vague. Je n’avais jamais vécu cette intensité dans ma carrière. Découverte a fait 14 émissions spéciales sur la COVID, et huit reportages dans des émissions qui traitaient d’autres sujets. C’est quasiment la totalité de notre production de l’année qui a été en partie ou totalement consacrée à la COVID. »
Le Gala Artis est présenté ce soir à 19 h 30 sur les ondes de TVA.