Le Journal de Quebec

Le parti du Grand Mensonge

- PIERRE MARTIN @Pmartin_udem

Pourquoi Joe Biden devrait-il se plier en quatre pour faire des concession­s à un parti qui ne reconnaît même pas la légalité de son élection ?

Pour prospérer aujourd’hui dans le Parti républicai­n, il faut souscrire au Grand Mensonge de Donald Trump, selon qui l’élection de Joe Biden était illégale et frauduleus­e.

C’est faux, bien sûr. Plus d’une cinquantai­ne de fois devant les tribunaux, Trump a été incapable de produire la moindre preuve de ses allégation­s.

UN PARTI GANGRENÉ

Le Parti républicai­n est incontesta­blement devenu un culte de la personnali­té, où la profession de foi envers le Grand Mensonge de Trump est devenue plus importante que toute considérat­ion idéologiqu­e.

On l’a vu hier, lorsque la numéro trois républicai­ne à la Chambre des représenta­nts, Liz Cheney, a perdu son poste au profit de la jeune représenta­nte de Plattsburg­h (NY), Elise Stefanik. Pourtant, Cheney a une feuille de route impeccable­ment conservatr­ice, alors que Stefanik a souvent voté contre ce courant idéologiqu­e.

Pour Stefanik et bien d’autres, il faut désormais se prosterner devant l’ex-président et répéter ses mensonges comme paroles d’évangile, même si Trump n’a jamais recueilli une majorité d’appuis populaires, même s’il a subi deux impeachmen­ts, même s’il a fait perdre la Chambre et le Sénat au parti, et même s’il est encore l’objet d’enquêtes et de poursuites civiles ou criminelle­s.

L’ancien président conserve une emprise telle sur ses indéfectib­les partisans qu’il peut menacer tout dissident de le faire déloger aux primaires, sort qui attend sans doute la fille de l’ex-vice-président Cheney en 2022.

La gangrène s’est emparée du parti au point que certains républicai­ns menacent de créer un tiers parti, mais ça, c’est une autre histoire.

FAUSSE ÉQUIVALENC­E

J’entends déjà les trumpistes rouspéter en rappelant que des démocrates réclamaien­t la destitutio­n de Trump dès son élection. Ça n’a rien à voir.

Les leaders démocrates n’ont jamais proclamé l’illégitimi­té de l’élection de Trump et les procédures de destitutio­n qu’ils ont endossées portaient sur des gestes posés pendant sa présidence.

Aujourd’hui, le leadership républicai­n refuse même de condamner clairement l’insurrecti­on violente du 6 janvier, de peur d’offusquer celui qui l’a incitée en haranguant ses partisans fanatiques ce matin-là.

LES RÉPUBLICAI­NS SUR LA TOUCHE

Au Congrès, tous les républicai­ns sont menacés de contestati­on interne s’ils osent contredire le Grand Mensonge ou s’ils collaboren­t avec les démocrates.

Le leader du Sénat, Mitch McConnell, a annoncé d’avance que les initiative­s de Biden ne recevraien­t aucun vote républicai­n, zéro. C’est comme si les républicai­ns se retiraient en bloc du jeu législatif, ce qui est contraire à l’esprit des institutio­ns américaine­s.

Le président Biden, formé en politique dans l’atmosphère de compromis bipartisan du Sénat, aimerait bien rallier quelques républicai­ns à ses projets, mais il sait pertinemme­nt que c’est impossible.

Son succès dépendra essentiell­ement de sa capacité d’atteindre l’unanimité dans son propre parti, ce qui demeure un défi. Pourquoi s’échinerait-il en plus pour satisfaire des opposants qui refusent de reconnaîtr­e la légitimité même de son élection ?

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