Ça chauffe en Arctique !
L’arctique — le Nunavut, la Terre de Baffin, l’île d’ellesmere — c’est à nous, non ? Quand j’étais plus jeune, c’est l’impression que j’avais : « Mon pays, ce n’est pas un pays, c’est l’hiver », me semble que c’est clair. En fait, ils sont de plus en plus nombreux à vouloir jouer dans notre arrière-cour.
Le réchauffement climatique y est pour beaucoup. On nous le répète souvent, partout sur la planète, les températures sont en hausse, mais le choc est encore plus intense en Arctique. La semaine dernière encore,
Marc Garneau, le ministre canadien des Affaires étrangères le rappelait, les experts ont calculé que la région se réchauffe trois fois plus vite qu’ailleurs au monde.
C’est ce que confirment, saison après saison, les données récoltées un peu partout au nord du cercle arctique. Le
25 juillet l’année dernière, par exemple, un nouveau record de chaleur a été enregistré à Eureka, dans le Nunavut, à plus de
3850 kilomètres en ligne droite de Montréal : 21,9 °C !
Dans l’archipel norvégien du Svalbard, la température la nuit du 28 juillet dernier n’est pas descendue sous 16,8 °C, du jamais vu si près du pôle Nord.
Et à Verkhoïansk, dans le Nord sibérien, le thermomètre a marqué 38 °C… 100 °F !
UN DÉGEL INVITANT
Du coup, les glaces millénaires disparaissent, facilitant la circulation maritime et l’exploitation de ressources étonnamment abondantes dans ces coins inhospitaliers.
La pêche industrielle s’y est intensifiée, tout comme l’extraction de minerais précieux et de terres rares ainsi que la prospection de gisements difficilement exploitables jusqu’à maintenant de gaz et de pétrole.
Les huit pays membres du Conseil de l’arctique, dont le Canada, se sont retrouvés mercredi et jeudi à Reykjavik, en Islande, pour mettre un peu d’ordre dans tout cela. Le communiqué final insiste sur la volonté de « maintenir la paix, la stabilité et une coopération constructive dans la région ».
UN REGEL INQUIÉTANT
C’est que les Américains se méfient des Russes qui modernisent, le long de la Sibérie, des bases militaires laissées plus ou moins à l’abandon depuis la fin de la guerre froide. Moscou, pour sa part, se braque devant la décision de Washington d’envoyer, sous le parapluie de L’OTAN, des bombardiers en Norvège.
La Chine, qui se présente comme un État « quasi arctique », veut aussi sa part, elle qui, dans son « Initiative de la Ceinture et de la Route », son gigantesque projet mondial d’infrastructures, fait référence au secteur comme la « Route polaire de la soie ».
Par chance, le secrétaire d’état américain Antony Blinken, sourire en coin, a confirmé que les États-unis n’avaient nullement l’intention de racheter le Groenland, idée farfelue avec laquelle Donald Trump avait flirté.
On aurait cru que les hivers interminables, les mers glacées et les décors de neige à perte de vue allaient garder le Grand Nord éternellement tranquille et pacifique. Paradoxal de décrire ainsi les lointaines terres du père Noël, mais en y insérant le commerce mondial à l’heure persistante de la mondialisation et la rivalité renouvelée entre grandes puissances, l’arctique est désormais devenu un point chaud géopolitique.