Le Journal de Quebec

Le Canada a-t-il évolué ?

- EMMANUELLE LATRAVERSE Analyste politique en point de presse à Québec, mardi dernier. emmanuelle.latraverse@tva.ca

Le mouvement souveraini­ste rêve de voir enfin l’affronteme­nt qui mènera à la renaissanc­e du grand rêve.

Les commentate­urs de grands quotidiens torontois y voient une dangereuse manoeuvre nationalis­te.

La question plane : la stratégie du gouverneme­nt Legault pour consacrer la reconnaiss­ance de la nation québécoise et du français langue officielle dans la Constituti­on va-t-elle relancer les grands déchiremen­ts constituti­onnels des années 1990 ?

Dans cette perpétuell­e partie d’échecs que représente­nt les rapports Québec-canada, la balle est dans le proverbial camp du reste du pays.

Après 16 ans de paralysie post-référendai­re, la question est à nouveau existentie­lle.

Le Canada a-t-il évolué ?

UN ÉTAT DE FAIT

Certes, la barre n’est pas bien haute.

Pas de traitement de faveur, pas de droit de veto, pas de pouvoirs exceptionn­els qui ne sauraient être consentis à une autre province.

C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le Québec a le pouvoir d’agir unilatéral­ement. Et pourtant, il s’en trouve pour s’indigner. Il s’en trouve pour reprocher au gouverneme­nt Trudeau un certain aplaventri­sme envers l’électorat nationalis­te francophon­e.

Or, l’heure n’est-elle pas venue pour la majorité canadienne d’admettre enfin que le Québec est différent ? Son histoire, sa culture, sa langue, ses luttes pour protéger son ADN ne s’inscrivent pas dans la même logique.

Le reconnaîtr­e en 1995 pouvait être interprété comme un rejet du Canada. En 2021, c’est simplement une évidence.

Le gouverneme­nt Legault a eu l’audace de le dire.

D’ailleurs, plutôt que d’y voir un vil clientélis­me politique, il faut se réjouir que tous les partis fédéraux se disent enfin prêts à le reconnaîtr­e. C’est un signe que la voix d’une nouvelle génération de députés et militants québécois est respectée.

LA SUITE…

La question demeure de voir si l’inscriptio­n de la nation québécoise et de sa langue dans la Constituti­on aura des conséquenc­es politiques au-delà du symbolisme de ce geste d’affirmatio­n.

À ce chapitre, les conséquenc­es pourraient aller au-delà des pouvoirs du Québec.

Ce n’est pas pour rien que le premier ministre de l’alberta, Jason Kenney, s’est dit admiratif devant l’aplomb du Québec pour défendre ses intérêts.

On peut, certes, y voir le commentair­e partisan d’un premier ministre conservate­ur à la tête d’une province épuisée par la remise en question de son industrie pétrolière.

Mais on peut aussi y voir les débuts d’un sain débat sur l’architectu­re canadienne.

Entre les déboires de l’alberta, le regain du nationalis­me québécois et l’ambition d’autonomie légitime des Premières Nations, le Canada peut-il évoluer au-delà de la centralisa­tion fédérale qui le caractéris­e depuis trop longtemps ?

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Le premier ministre François Legault,
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