Le Canada a-t-il évolué ?
Le mouvement souverainiste rêve de voir enfin l’affrontement qui mènera à la renaissance du grand rêve.
Les commentateurs de grands quotidiens torontois y voient une dangereuse manoeuvre nationaliste.
La question plane : la stratégie du gouvernement Legault pour consacrer la reconnaissance de la nation québécoise et du français langue officielle dans la Constitution va-t-elle relancer les grands déchirements constitutionnels des années 1990 ?
Dans cette perpétuelle partie d’échecs que représentent les rapports Québec-canada, la balle est dans le proverbial camp du reste du pays.
Après 16 ans de paralysie post-référendaire, la question est à nouveau existentielle.
Le Canada a-t-il évolué ?
UN ÉTAT DE FAIT
Certes, la barre n’est pas bien haute.
Pas de traitement de faveur, pas de droit de veto, pas de pouvoirs exceptionnels qui ne sauraient être consentis à une autre province.
C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le Québec a le pouvoir d’agir unilatéralement. Et pourtant, il s’en trouve pour s’indigner. Il s’en trouve pour reprocher au gouvernement Trudeau un certain aplaventrisme envers l’électorat nationaliste francophone.
Or, l’heure n’est-elle pas venue pour la majorité canadienne d’admettre enfin que le Québec est différent ? Son histoire, sa culture, sa langue, ses luttes pour protéger son ADN ne s’inscrivent pas dans la même logique.
Le reconnaître en 1995 pouvait être interprété comme un rejet du Canada. En 2021, c’est simplement une évidence.
Le gouvernement Legault a eu l’audace de le dire.
D’ailleurs, plutôt que d’y voir un vil clientélisme politique, il faut se réjouir que tous les partis fédéraux se disent enfin prêts à le reconnaître. C’est un signe que la voix d’une nouvelle génération de députés et militants québécois est respectée.
LA SUITE…
La question demeure de voir si l’inscription de la nation québécoise et de sa langue dans la Constitution aura des conséquences politiques au-delà du symbolisme de ce geste d’affirmation.
À ce chapitre, les conséquences pourraient aller au-delà des pouvoirs du Québec.
Ce n’est pas pour rien que le premier ministre de l’alberta, Jason Kenney, s’est dit admiratif devant l’aplomb du Québec pour défendre ses intérêts.
On peut, certes, y voir le commentaire partisan d’un premier ministre conservateur à la tête d’une province épuisée par la remise en question de son industrie pétrolière.
Mais on peut aussi y voir les débuts d’un sain débat sur l’architecture canadienne.
Entre les déboires de l’alberta, le regain du nationalisme québécois et l’ambition d’autonomie légitime des Premières Nations, le Canada peut-il évoluer au-delà de la centralisation fédérale qui le caractérise depuis trop longtemps ?