« Pour certains, la ceinture, c’est bon pour les autres »
Plusieurs observateurs pointent du doigt une sensibilisation insuffisante et la pandémie pour expliquer le laisser-aller quant au port de la ceinture de sécurité.
« En sécurité routière, on voit souvent le phénomène du petit enfant. Il faut répéter souvent. Quand on remarque un relâchement par rapport à une problématique, comme la ceinture de sécurité, c’est que les gens oublient rapidement. La nature humaine est comme ça, on oublie, on reprend les mauvaises habitudes », expose Marco Harrison, de Caa-québec.
Dans le milieu des années 1990, les Québécois avaient été bombardés de publicités sur les dangers de ne pas s’attacher en voiture, se souvient la psychologue experte en sécurité routière Louise Nadeau.
« Ce qui est clair, c’est que si tu arrêtes de faire de la prévention, tu as une génération, la jeune, qui n’est pas exposée à l’information. Conséquence ? Certains ne s’attachent pas », indique la professeure émérite au département de psychologie de l’université de Montréal.
PAS D’AUTRES CAMPAGNES
Au Québec, la dernière campagne de sensibilisation sur le port de la ceinture de sécurité remonte à 2018, confirme la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ).
L’organisme ne prévoit pas à court terme marteler le message pour inciter conducteurs et passagers à s’attacher.
« On veut voir si 2020 a été une année atypique. Si on voit qu’il y a une tendance, on va intervenir », indique la porte-parole, Sophie Roy.
La COVID-19 a eu son effet sur le bilan routier. Même si les routes ont été désertées pendant plusieurs semaines au début de la pandémie, l’année 2020 a malgré tout été particulièrement mortelle, alors qu’on a déploré neuf décès de plus que l’année précédente.
Et la vitesse était également largement surreprésentée parmi les causes d’accidents graves et mortels, selon l’organisme du gouvernement québécois.
« Est-ce que c’est la population active qui a eu à se déplacer qui s’est permis d’aller vite puisqu’il y avait moins de monde sur les routes ? Est-ce que les gens se sentaient légitimés de rouler sans respecter les règles ? On devra l’analyser », dit Sophie Roy, de la SAAQ.
« On a tellement été mobilisé dans la contrainte depuis un an, l’importance de s’attacher était peut-être loin derrière », ajoute la psychologue Diane Thibodeau.
BIEN VISER
Cette dernière prône également la sensibilisation, mais à condition que le message « touche » ceux qui ne la bouclent pas.
« Pour certains, porter la ceinture, c’est bon pour les autres. Ça reste un voeu pieux, comme si ça ne représentait pas un réel danger. Tant que tu n’as pas eu peur d’y laisser ta peau, qu’un proche ou un ami se ramasse quadriplégique ou décède, c’est pour les autres et non pour toi, la ceinture », insiste-t-elle.