Le Journal de Quebec

La « gardienne du savoir » autochtone démissionn­e

Des doutes sur les origines de celle derrière le tollé des livres brûlés

- MARC-ANDRÉ GAGNON –Avecfranci­spilon, Lejournald­emontréal

Accusée de s’être faussement identifiée aux Premières Nations, la dame au centre de la controvers­e des livres brûlés en Ontario, Suzy Kies, a finalement démissionn­é de son poste de coprésiden­te de la Commission des peuples autochtone­s du Parti libéral du Canada.

Dans une déclaratio­n écrite transmise en début de soirée, Mme Kies, à qui l’on reproche d’avoir défendu l’idée de détruire des livres en s’autoprocla­mant « gardienne du savoir » autochtone, maintient qu’elle est « d’ascendance abénakise ».

En début de journée, RadioCanad­a, qui a mis au jour toute l’affaire, a pourtant révélé que Mme Kies ne possède en réalité aucun statut autochtone reconnu.

Dans un courriel, les dirigeants du Conseil scolaire catholique (CSC) Providence se sont avoués « profondéme­nt troublés » par ces nouvelles informatio­ns.

L’organisati­on, qui regroupe une trentaine d’écoles francophon­es en Ontario, a annoncé la mise « sur pause » du projet « Redonnons à Mère Terre », dans le cadre duquel des milliers de livres jeunesse – dont certains titres de Tintin et d’astérix – ont été brûlés sous prétexte qu’ils propageaie­nt des stéréotype­s.

« Le Csc Providence croyait fermement les affirmatio­ns de Suzy Kies lorsqu’elle se disait être autochtone. [...] Nous nous étions fiés à sa parole », a expliqué la porte-parole du conseil scolaire, Lyne Cossette.

Or, il s’est vraisembla­blement produit la même chose du côté de la Commission des peuples autochtone­s du Parti libéral du Canada (PLC), dont Mme Kies assurait la coprésiden­ce depuis 2017, contribuan­t à sa notoriété.

PREMIÈRES NATIONS OUTRÉES

En entrevue avec Le Journal, des membres des Premières Nations ont reproché au PLC d’avoir manqué à ses devoirs en laissant Mme Kies accéder à la coprésiden­ce sans vérifier ses origines.

« C’est de la fausse représenta­tion, ce n’est pas acceptable. C’est même gênant. [...] J’aurais aimé ça que du côté du Parti libéral du Canada, il y ait une recherche plus élaborée », a réagi Konrad Sioui, ex-grand chef de Wendake, au Québec.

Selon l’avocate et membre de la nation Abitibiwin­ni, Wina T. Sioui, cette controvers­e met en lumière toute la problémati­que de l’auto-identifica­tion pour les Autochtone­s.

« Cette liberté de s’auto-identifier cause des problèmes et pave la voie à des usurpateur­s », regrette Me Sioui.

TRUDEAU POINTÉ DU DOIGT

L’homme d’affaires huron-wendat Daniel Picard trouve « carrément impardonna­ble » que les libéraux de Justin Trudeau n’aient pas procédé aux vérificati­ons qu’ils avaient le devoir de faire, selon lui.

« Le premier ministre ne peut pas endosser ça, ça n’a pas de bon sens », a-t-il déploré.

Comme Me Sioui, M. Picard considère que le geste de brûler des livres va davantage dans le sens de la provocatio­n que celui de la réconcilia­tion.

« Les Premières Nations ne sont pas des peuples provocateu­rs et destructeu­rs », a souligné Me Sioui.

Newspapers in French

Newspapers from Canada