Le Journal de Quebec

Les fausses nouvelles amènent du profit

- ROXANE TRUDEL

Les grands réseaux sociaux n’ont pas vraiment intérêt à restreindr­e la propagatio­n de fausses nouvelles parce qu’elles leur amènent des clics et du profit, expliquent des experts.

« C’est clair que pour les réseaux sociaux, c’est un équilibre très fragile entre ne pas trop être une courroie de disséminat­ion de fausses informatio­ns, et en même temps, rester profitable­s. Pour eux, le sensationn­alisme, les grandes émotions, ça fait vendre », soutient Nadia Seraiocco, chargée de cours à l’école des médias de L’UQAM.

Hier, la nouvelle du décès d’une jeune fille de 14 ans à son école de Montréal s’est répandue comme une traînée de poudre à cause d’un rapprochem­ent erroné entre l’annonce de sa mort dans un communiqué et la vaccinatio­n qui avait lieu à son école au même moment. Pourtant, ses proches ont confirmé au Journal que le tragique événement n’a rien à voir avec le vaccin ( voir autre texte en page 10).

CONTENU SENSATIONN­ALISTE

Le problème, c’est que des anti-vaccins ont saisi l’opportunit­é pour utiliser ce drame à leur avantage. En quelques heures à peine, la fausse nouvelle avait déjà été relayée dans des dizaines de publicatio­ns, dont certaines ont été partagées plus de 2000 fois.

« C’est un cas typique où les gens fabriquent eux-mêmes la nouvelle et la partagent tellement que des pages “clickbait” reprennent l’info juste pour continuer les clics. La mécanique des réseaux sociaux aide à faire ce genre de campagne », poursuit l’experte. Or, les plateforme­s comme Facebook tirent notamment leur profit de la publicité : elles ont donc tout avantage à garder l’attention sur leur réseau le plus longtemps possible.

« Certains chercheurs vont même jusqu’à dire que leur modèle d’affaires est basé sur des algorithme­s qui encouragen­t les internaute­s à s’alimenter en contenu sensationn­aliste, voire incendiair­e, pour capter l’attention », relate Simon Thibault, professeur adjoint au départemen­t de science politique de l’université de Montréal.

« Les plateforme­s font du ménage, mais beaucoup de chercheurs trouvent que ce n’est pas suffisant et que l’état doit intervenir pour légiférer et pour rendre ces plateforme­s plus imputables », ajoute l’expert en désinforma­tion.

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