Le Journal de Quebec

Le torchon brûle toujours entre la juge en chef et le ministre

La juge Lucie Rondeau poursuit Simon Jolin-barrette au sujet du bilinguism­e

- La juge en chef Lucie Rondeau lors d’une entrevue accordée au JEAN-FRANÇOIS RACINE en juillet 2018.

La juge en chef de la Cour du Québec Lucie Rondeau, qui souhaite le bilinguism­e quasi systématiq­ue des juges, a décidé de faire valoir sa position en poursuivan­t le ministre de la Justice Simon Jolin-barrette.

La question linguistiq­ue est une fois de plus à l’avant-plan avec une procédure plutôt rare en Cour supérieure. Depuis plusieurs mois, l’exigence du bilinguism­e dans le processus de sélection des juges provoque un désaccord entre les parties et le torchon brûle.

Dans un document de 41 pages transmis hier au gouverneme­nt, le Conseil de la magistratu­re du Québec, la juge en chef de la Cour du Québec, ainsi que le juge en chef associé visent le ministre Jolin-barrette et le secrétaire à la sélection des candidats à la fonction de juge.

Ils exigent notamment au gouverneme­nt l’annulation des avis de sélection des candidats à la fonction de juge à la Cour du Québec, publiés le 8 octobre 2021.

Ces récents avis, disent-ils, ne contiennen­t pas d’exigence de maîtrise de la langue anglaise pour des postes dans les districts judiciaire­s de Montréal, Joliette, Labelle, Laval et Terrebonne. Selon eux, il faut absolument suspendre le processus en raison du sérieux de ce débat.

Rappelons que Simon Jolin-barrette est également le ministre responsabl­e de la Langue française.

INGÉRENCE DU MINISTRE

La juge Rondeau dénonce même une ingérence illégale du ministre de la Justice.

Cette procédure devant le tribunal viserait, selon elle, à protéger l’indépendan­ce judiciaire et à dépolitise­r le processus de sélection.

Le gouverneme­nt a répété qu’il n’est pas contre le bilinguism­e, mais n’accepte pas le recours systématiq­ue à cette exigence lorsque ce n’est pas justifié.

Québec estime que les avocats devraient tous pouvoir espérer accéder à la magistratu­re et la maîtrise d’une langue autre que la langue officielle ne devrait pas d’emblée représente­r un obstacle.

Les parties ne s’entendent pas à savoir si les affichages de poste et toutes les nomination­s de juges ont été faits en tout respect du règlement en vigueur.

DÉSACCORD

Par ailleurs, le bras de fer sur la place publique ne date pas d’hier entre Simon Jolin-barrette et la juge Rondeau.

Le ministre de la Justice a récemment modifié son projet de loi instaurant un tribunal spécialisé en violence sexuelle et conjugale puisque celui-ci a fait l’objet d’un désaccord majeur sur plusieurs points.

Malgré plusieurs modificati­ons apportées par Simon Jolin-barrette à son projet de loi 92, libéraux, solidaires et péquistes craignent qu’elles soient insuffisan­tes pour réconcilie­r sa position avec celle de la juge Rondeau. Cette dernière a également plaidé l’ingérence politique dans cet autre dossier.

Extrait de la demande

« Les demandeurs sont contraints de solliciter urgemment l’interventi­on de cette Cour parce que les avis font fi des besoins de la Cour du Québec exprimés par la juge en chef pour certains postes de juges à la Cour, et ce, à la suite d’une ingérence illégale du ministre de la Justice (…) »

Réaction du cabinet du ministre

« Le processus de sélection a été respecté en tous points. Les droits de tous les justiciabl­es sont respectés. Toutes les avocates et tous les avocats francophon­es du Québec devraient pouvoir espérer accéder à la magistratu­re (…) »

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PHOTO D’ARCHIVES, DIDIER DEBUSSCHÈR­E Journal
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SIMON JOLIN-BARRETTE Ministre de la Justice

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