Le Journal de Quebec

Leur rêve vire au cauchemar

À peine installés au Québec, ils doivent débourser près de 11 500 $ en soins chaque jour depuis trois semaines

- JÉRÉMY BERNIER

Les espoirs d’une nouvelle vie pour une famille algérienne ont pris une tournure dramatique quand la mère s’est retrouvée aux soins intensifs quelques jours après son arrivée au Québec, pour la modeste somme d’environ 11 500 $ la nuitée.

« Le Québec, c’était notre rêve à tous les deux. On ne va pas se mentir, c’est devenu un cauchemar », confie tristement Abderrahma­ne Kamel Hafiz, rencontré par Le Journal dans son logement du quartier Saint-sauveur, à Québec.

L’homme a quitté son pays pour la Vieille Capitale le 10 mars dernier, avec sa femme, Fairouz Kinez, et leurs deux enfants. C’est un contrat de travail pour la firme Alithya, spécialisé­e en stratégie et technologi­e numérique, qui lui a permis de faire le grand saut.

Une semaine plus tard, la femme de M. Hafiz doit cependant se rendre à l’hôpital pour des douleurs à la poitrine. Un test PCR a alors confirmé qu’elle avait contracté la COVID-19 et on l’a renvoyée à la maison en isolement pendant cinq jours.

QUATRE VIRUS ET UN CANCER

Mais la situation a ensuite dégénéré. De retour au centre hospitalie­r le 29 mars, elle est rapidement transférée à l’hôpital de l’enfant-jésus, aux soins intensifs, puis plongée dans le coma, trois jours plus tard.

C’est à ce moment qu’on découvre que Mme Kinez n’est pas seulement atteinte du coronaviru­s, mais aussi du virus d’epsteinBar­r, du cytomégalo­virus et d’une autre infection, simultaném­ent.

Le tout causé par un lymphome non hodgkinien, un type de cancer agressif qui s’attaque au système lymphatiqu­e et donc au système immunitair­e.

« Tout a déboulé en même temps. Elle avait divers problèmes respiratoi­res, au foie, aux reins et elle avait les ganglions enflés sur tout le corps », relate son mari.

Depuis quelques jours, les médecins ont diminué la quantité de médicament­s de sa femme pour la pousser à se réveiller tranquille­ment de son coma, tout en poursuivan­t des traitement­s de chimiothér­apie.

On ne sait toutefois pas encore combien de temps elle devra demeurer aux soins intensifs.

DES DETTES PAR-DESSUS LA TÊTE

« L’important, c’est qu’elle s’en sorte, qu’elle rentre à la maison et qu’elle puisse revoir ses enfants, souffle l’homme de 47 ans. C’est sûr que je pense aux dettes, mais on s’y attaquera plus tard. »

Le coût d’une hospitalis­ation à l’unité de soins intensifs pour les non-résidents canadiens à l’hôpital de l’enfant-jésus est de 11 415 $ par jour, d’après le CHU de Québec. Un prix que la famille de M. Hafiz devra payer dans son entièreté, en raison de la carence trois mois avant d’être admissible au Régime de l’assurance maladie du Québec (RAMQ).

Ils avaient bien sûr adhéré à une assurance privée avec Desjardins, mais les 100 000 $ de couverture ont rapidement été écoulés. Après 24 jours de traitement­s, la facture s’élève désormais à plus de 274 000 $.

Comble de l’ironie, le mandat attribué à M. Hafiz par la firme Alithya est celui d’informatic­ien pour la RAMQ.

« Ça aurait pu arriver à n’importe qui », déplore le père de famille, qui espère que son témoignage fera changer les choses auprès du régime d’assurance publique.

Une campagne Gofundme lancée par un ami de la famille, ainsi qu’une aide inattendue de la communauté maghrébine de Québec, a permis à la famille d’alléger son fardeau d’environ 35 000 $.

 ?? PHOTO DIDIER DEBUSSCHER­E ET COURTOISIE ?? Abderrahma­ne Kamel Hafiz a quitté l’algérie pour s’installer à Québec avec sa famille le 10 mars dernier. Trois semaines plus tard, sa femme, Fairouz (en mortaise), s’est retrouvée aux soins intensifs de l’hôpital de l’enfant-jésus, où elle se trouve toujours.
PHOTO DIDIER DEBUSSCHER­E ET COURTOISIE Abderrahma­ne Kamel Hafiz a quitté l’algérie pour s’installer à Québec avec sa famille le 10 mars dernier. Trois semaines plus tard, sa femme, Fairouz (en mortaise), s’est retrouvée aux soins intensifs de l’hôpital de l’enfant-jésus, où elle se trouve toujours.

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