Trudeau bâtit un argumentaire pour les souverainistes
L’indépendance du Québec reviendra-t-elle au coeur de l’actualité dans un avenir prévisible ? Jusqu’à l’an dernier, j’y croyais peu. Mais le radicalisme du gouvernement canadien dans le dossier de l’immigration pourrait changer la donne.
Les hausses rapides des seuils d’immigration et le fantasme des 100 millions de Canadiens en 2100 secouent les convictions. Autour de moi, j’entends des gens qui ne se considèrent pas comme souverainistes, mais qui ne savent plus trop quelle place il restera pour le Québec dans ce Canada transformé.
LE QUÉBEC PAS CONSIDÉRÉ
Les Québécois reçoivent aussi brutalement le message que le nouveau projet du Canada s’est défini sans tenir compte du Québec. Le Canada anglais a bâti son rêve sans prendre en considération la spécificité du Québec, avec son obligation de protéger sa langue et sa culture.
Ce n’est pas seulement une impression, une sénatrice associée à cette Initiative du siècle a avoué candidement qu’en planifiant une telle révolution pour le Canada, ils n’avaient pas pensé à l’avenir du français. Voilà qui a le mérite d’être honnête.
La nouvelle politique de Justin Trudeau apporte beaucoup d’eau au moulin des souverainistes. L’augmentation considérable des seuils d’immigration, sans aucune consultation du Québec, vient donner du poids à plusieurs arguments mille fois entendus parmi les tenants de l’indépendance.
Argument no 1 : le Québec devrait avoir les pleins pouvoirs en matière d’immigration. Ça semble de plus en plus vrai.
Argument no 2 : le Québec devrait pouvoir contrôler le nombre de nouveaux arrivants qu’il veut accueillir annuellement. Avec l’explosion des nombres dans des catégories comme les temporaires et les réfugiés, cet argument prend tout son sens.
Argument no 3 : au moment de quitter son pays, un immigrant devrait savoir qu’il se dirige vers le Québec, où la langue est le français. Présentement, même s’il est accueilli à Montréal, l’immigrant sent qu’il vient au Canada, un pays anglophone complètement multiculturel. Le ministère québécois tente, tant bien que mal, d’insérer le français dans l’équation.
Argument no 4 : le pouvoir du Québec risque de décliner dans le Canada. Cela n’a jamais été aussi vrai. Advenant que le Canada garde le cap sur cette cible d’une population de 100 millions en 2100 et que le Québec maintienne ses seuils d’immigration actuels, le poids du Québec dans le Canada va fondre.
Dans à peine plus d’une décennie, le Québec ne représentera même plus 20 % de la population du Canada. Notre poids politique à la Chambre des communes et ailleurs va devenir de plus en plus insignifiant. Nous n’aurons plus d’influence politique sur le Canada. Le Québec va se faire imposer son destin, tout simplement.
QUE FERA LEGAULT ?
Le premier qui se retrouve dans le pétrin, c’est François Legault.
En tant que chef nationaliste, il promet de ne pas abandonner la francisation au coeur de sa politique d’immigration. Comment pourra-t-il alors accepter sans rien dire de voir se diluer le poids politique du Québec ? Il en fait abstraction pour l’instant. Or il y a un trou dans son argumentaire. Cela s’entendait hier à l’assemblée nationale.
Le besoin de contrôler notre immigration devient plus ressenti