Des mesures pour « bien paraître »
Certaines étaient avant tout mises en place par la SQ pour se donner bonne image, selon un expert
L’expert en recherche terrain Alain Croteau persiste et signe : certaines des mesures mises en place par la SQ lors de l’opération visant à retrouver Norah et Romy Carpentier relevaient plus du bien-paraître que de chances réelles de retrouver les petites.
Le policier retraité avait tenu des propos similaires lors de sa participation à l’émission Enquête sur l’opération Carpentier à l’hiver 2022. Hier, contre-interrogé par l’avocate qui représente le ministère de la Sécurité publique et la Sûreté du Québec, Alain Croteau a réitéré ce dur constat.
« Il y a eu des mesures efficaces, mais je pense que certaines des mesures prises étaient dans l’ordre de calmer les ardeurs, de se donner une bonne image. C’est triste à dire, mais c’est mon opinion. »
L’expert qui a travaillé 27 ans au sein du corps de police provinciale a affirmé avoir déjà pris part à de telles mesures « pour calmer l’opinion publique » au fil de sa carrière.
Il cite notamment l’utilisation de l’hélicoptère, « d’où on ne voit rien avec la canopée dans le bois » ou celle de l’avion de Transports Canada équipé d’une caméra thermique.
« C’est une ressource demandée qui n’a rien produit en termes de résultats tangibles », expose Alain Croteau, qui aurait souhaité plus d’effectifs de chercheurs sur le terrain et une meilleure stratégie globale.
UNE VENDETTA ?
La procureure Marie-claude Poulin, qui s’était jointe à une requête en exclusion du témoin pour partialité qui a finalement été refusée par le coroner, a également questionné M. Croteau sur la possibilité que sa présence à l’enquête lui serve de vendetta envers la SQ.
« Ça fait deux ans que je suis retraité et je suis très bien à la retraite. [...] Lorsque le dossier s’est présenté et que j’ai eu l’occasion de venir témoigner, je trouvais que j’avais une expertise à partager et c’est ce que je fais. Maintenant, ce que la SQ fera avec cette expertise [...] vous en faites ce que vous voulez », a rétorqué l’expert.
L’impartialité de ce dernier a encore été remise en doute par les parties intéressées, l’avocate du Procureur général du Québec le questionnant aussi sur l’utilisation dans son rapport et son témoignage de termes trahissant une certaine émotivité. Des termes comme « honteux », « menterie », « triste », « malheureux ».
« Un expert ne devrait-il pas se détacher de cette charge émotive pour fournir une opinion impartiale ? »
« Je réponds avec mon coeur. Je ne suis pas capable de voir de moments neutres dans ce qu’a vécu Mme Lemieux [la mère de Norah et Romy] », a rappelé le témoin. Il a ajouté que s’il arrivait à la conclusion que quelque chose « n’avait pas de bon sens », ce n’était pas parce qu’il avait du ressentiment, mais plutôt parce que « ce qui devait être fait n’a pas été fait ».
SPÉCIALITÉ À RECONNAÎTRE
Et qu’est-ce qui n’a pas été fait ? Les constats du manque d’effectifs et des erreurs stratégiques ont été posés tout au long de l’enquête.
Pour Alain Croteau, la priorité absolue pour la suite est que la Sûreté du Québec reconnaisse la spécialisation en recherche terrestre. « Quand on fait venir le démineur, on ne lui dit pas de couper le fil rouge », illustre l’ex-policier pour expliquer son argument.
D’après ce dernier, lorsque la direction reconnaîtra l’expertise, le reste suivra et on pourra éviter les échecs comme celui du dossier Carpentier.