Le Journal de Quebec

Zéro femme tuée grâce au bracelet antirappro­chement

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MADRID, Espagne | Les bracelets antirappro­chements, auxquels le ministère de la Sécurité publique du Québec commence à recourir, ont prouvé leur efficacité depuis plus d’une décennie en Espagne : aucune des 13 000 victimes de violence conjugale protégées par cet outil n’a été tuée.

« L’avantage du bracelet, c’est qu’il avertit les autorités avant. Si l’ordre d’éloignemen­t est de 500 mètres, le dispositif sonne quand l’homme est à moins de 1000 mètres. La victime va alors pouvoir chercher où se protéger, comme dans un magasin ou chez elle », explique Marta Fernández Ulloa, cheffe de l’unité de protection des femmes de la police de Madrid.

Depuis 2009, plus de 13 000 hommes violents ont été contraints de porter à la cheville ou au poignet ce dispositif, inventé à Madrid par un scientifiq­ue espagnol.

DISSUADER

« Il est clair que la technologi­e a un grand potentiel pour dissuader l’attaque tout en donnant à la victime un sentiment de protection et de sécurité », estime la criminolog­ue espagnole Lorea Arenas García.

« La mesure est également efficace pour arrêter les attaques potentiell­es, car il n’y a pas eu un seul cas de [meurtre] et elle a réussi à arrêter les intentions homicidair­es des attaquants qui ont franchi la zone d’exclusion », ajoute la professeur­e universita­ire dans une analyse.

Plutôt que la prison, les juges peuvent imposer cette mesure de surveillan­ce aux accusés ayant brisé leur ordonnance de protection. Ils déterminen­t également la distance d’éloignemen­t à ne pas franchir.

Les magistrats ont de plus en plus recours à ce dispositif, qui a prouvé son efficacité et qui s’est amélioré au fil des années. L’outil est également un moyen de preuve précieux, car toutes les alertes sont enregistré­es, ce qui évite à la victime de dénoncer l’infraction.

La juge María Gracia Perera de Cáceres, responsabl­e de l’un des tribunaux spécialisé­s en violence contre les femmes à Madrid, met toutefois en garde : « Pour certains profils d’accusés, le bracelet n’est pas la bonne solution. Des hommes qui ont des problèmes de consommati­on d’alcool ou de drogue ne vont jamais recharger la batterie, ce qui déclenche des alarmes. »

POUR FAIRE PEUR

De son côté, Gregorio Gómez Mata, directeur de l’associatio­n ALMA contre la violence de genre, estime également que les bracelets amènent un sentiment de sécurité aux femmes protégées. Or, des accusés « ont appris à l’utiliser pour inspirer la peur chez leur victime », ajoute-t-il.

« Comme l’alarme sonne à l’avance, ils vont par exemple aller prendre un café et dire ensuite qu’ils ne savaient pas que le bar se trouvait près du lieu de travail de leur victime. Psychologi­quement, ça devient très difficile pour ces femmes », explique-t-il.

Le Québec est la première province au Canada à déployer des bracelets antirappro­chements, il y a environ un an. Pour le moment, seuls les accusés qui purgent des peines provincial­es – de moins de deux ans – peuvent se voir imposer un bracelet.

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PHOTO CAPTURE D’ÉCRAN DU MINISTÈRE DE L’ÉGALITÉ Un homme se fait installer un bracelet antirappro­chement à la cheville.

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