L’insouciance des Américains
WASHINGTON | Pas un seul.
Les Américains, je leur parle tous les jours. Je vis ici. Pas un seul récemment n’a évoqué la guerre en Ukraine. Même quand j’insistais, auprès d’électeurs républicains, par exemple, dans les froids polaires de l’iowa ou auprès de démocrates plus au chaud en Caroline du Sud, l’ukraine m’a rarement valu plus qu’un haussement d’épaules.
Personne n’est contre la vertu et tout le monde veut la paix dans le monde, mais l’ukraine souffre de la même affliction que le réchauffement climatique, la COVID et, plus récemment, la destruction qu’engendre l’offensive israélienne à Gaza : on se lasse de tout.
Même ici, à Washington, dans mon quartier ou sur le chemin de la Maison-blanche, je croisais fréquemment, l’an dernier encore, un drapeau ukrainien placé à la fenêtre d’une résidence privée ou une affiche faite à la main sur fond jaune et bleu proférant #Westandwithukraine.
Ils ont disparu pour la plupart.
Anecdotique, j’admets, mais révélateur d’un essoufflement, d’une fatigue à l’égard d’un conflit qui s’éternise. Même l’envie de rafraîchir sa décoration finit par prendre le dessus sur la guerre d’ukraine.
CONSCIENCE
Le temps d’attention des Américains, leur capacité de concentration souffre d’agressions dont ils n’ont pas plus conscience que nous. Ne s’informant plus dans les journaux traditionnels, ils
scrollent d’un épiphénomène à l’autre sur leurs médias sociaux favoris.
Les grands bulletins d’information télé qui, jusqu’à il y a quelques années encore, leur offraient une perspective commune sur l’actualité n’envoient que rarement leurs reporters sur la ligne de front russo-ukrainienne.
À BOUT DE COMPASSION
Ce que j’entends plus souvent – et que corroborent d’ailleurs les firmes de sondage –, c’est que le coût de la vie a esquinté les finances de l’américain moyen et qu’une majorité craint de ne pas avoir les moyens de payer les soins de santé qu’impliquerait un accident grave.
Après l’immigration, la crise persistante des opioïdes et la violence armée, les Américains sont à bout de compassion pour les Ukrainiens.