Le retour du fantasme néoconservateur
Emmanuel Macron, en ouvrant la possibilité d’un envoi de troupes au sol, en Ukraine, pour combattre directement l’armée russe, a probablement confessé le fantasme d’une partie de l’élite occidentale, qui rêve d’en découdre directement avec Vladimir Poutine.
Certes, il y a eu une levée de boucliers : les dirigeants de chaque pays ont tout de suite indiqué qu’ils n’envisageaient aucunement d’engager leurs troupes sur le terrain ukrainien.
Il n’en demeure pas moins que l’idée a été semée. Il s’agit de préparer les populations à cette possibilité, que plusieurs, tôt ou tard, présenteront comme une nécessité, comme si nous marchions contre notre volonté vers une guerre qui pourrait se transformer en déflagration globale.
UKRAINE
Il va de soi que la guerre en Ukraine est un scandale. Il va de soi, aussi, que dans les limites de la juste raison et de la réalité de nos moyens, nous devons être solidaires de l’ukraine. Nous l’avons d’ailleurs été.
Mais on ne saurait transformer en exigence morale la mise en place d’une situation qui pourrait transformer une guerre régionale en une guerre mondiale, cela, à l’ère nucléaire.
Car c’est vers cette situation que se dirigerait notre monde si des hommes portant l’uniforme des armées de L’OTAN se retrouvaient quelque part sur le front est en train d’échanger des coups de feu avec des hommes de l’armée russe.
Devant cela, il faut oser parler de la paix.
Je sais que le terme choque : notre imaginaire, formé dans la matrice wilsonienne du XXE siècle, voudrait voir ce dernier s’effondrer, et la Russie capituler sans condition.
Mais il n’en sera pas ainsi.
Et la politique consiste d’abord à tenir compte des réalités. De même, nous sommes encore hantés par les accords de Munich, en 1938, qui avaient vu les démocraties européennes s’aplatir devant Hitler dans l’espoir de conserver la paix en Europe, en multipliant les concessions à son endroit.
Nous sommes depuis convaincus que toute paix de compromis prendra le même chemin et nous conduira au même désastre.
PAIX
Mais l’histoire ne rejoue pas toujours les mêmes scènes.
Longtemps, dans l’histoire humaine, la paix s’établissait non pas entre un vainqueur absolu et un vaincu absolu, mais entre deux ennemis trouvant finalement plus avantageux de cesser de se battre que de poursuivre une guerre les poussant à l’autodestruction.
Cette question se pose aujourd’hui en Ukraine.
On devine qu’elle devra faire des concessions territoriales, qui dépasseront la Crimée, et qui porteront sur l’est occupé du pays. Ces concessions devraient normalement s’accompagner d’une reconnaissance par la Russie de l’indépendance de l’état ukrainien, et d’une garantie donnée par L’OTAN aux pays limitrophes de la Russie que leur sécurité sera absolument assurée et leurs frontières protégées.
Chose certaine, dans le monde multipolaire qui est le nôtre, il faut renoncer au fantasme kantien de la paix perpétuelle, et renouer avec le concept d’équilibre des puissances. On appelle cela aussi se réconcilier avec la réalité.
Devant cela, il faut oser parler de la paix.