Le Journal de Quebec

Une carrière, mais à quel prix ?

Apologia évoque le dilemme de certaines femmes

- ALEXANDRE CAPUTO

S’il y a une leçon à tirer de la pièce Apologia, présentée au Théâtre La Bordée, c’est que les mères qui décident de suivre leurs ambitions profession­nelles doivent souvent le faire au détriment du bien-être de leur famille.

« T’as pas encore compris que tout ce qu’on a fait dans nos vies a été en réaction à ce que toi tu faisais ? », lance Simon (Marc-antoine Marceau), à sa mère, Kristin Miller (Marie-ginette Guay).

Cette réplique est celle qui résume le mieux la prémisse de la pièce Apologia, mise en scène par le codirecteu­r général et directeur artistique de La Bordée, Michel Nadeau, dont la première médiatique se tenait mercredi.

Kristin Miller est une historienn­e de l’art chevronnée. De tous les combats activistes au cours de sa jeunesse, elle a ensuite dévoué sa vie à sa carrière, pour enfin publier sa biographie, qui ne mentionne en aucun endroit l’existence de ses deux fils. Cette omission est loin d’être passée inaperçue aux yeux de ces derniers, qui ont souvent été relégués au second plan par leur mère dans le passé.

QUAND LE VASE DÉBORDE

C’est pendant un souper pour la fête de Mme Miller, avec ses deux fils et leurs conjointes (Rosalie Cournoyer et Annabelle Pelletier-legros), que la tension atteint son apogée et que le vase déborde finalement. Dans son rôle de profession­nelle aguerrie, mais de mère indigne, Marie-ginette Guay brille. Elle réussit à faire ressortir le côté fort, féministe et obstiné de son personnage, qui tente, sans succès, de se convaincre que ses ambitions n’ont pas nui à sa famille. Petit à petit, on sent, à travers le jeu de Mme Guay, que les barricades de Kristin Miller commencent à tomber, jusqu’aux dernières secondes de la pièce, où elle s’écroule carrément en pleurant.

CONTRASTE ENTRE LES PERSONNAGE­S

Rosalie Cournoyer et Annabelle Pelletier-legros excellent aux côtés de Marie-ginette Guay, dans Apologia.

L’une dans la peau d’une chrétienne américaine un peu simplette, l’autre dans le rôle d’une actrice de roman-savon aux goûts superficie­ls, les deux femmes jouent de façon assumée et convaincan­te.

Bien qu’elles soient diamétrale­ment opposées en ce qui concerne les valeurs et la personnali­té, les trois personnage­s se tiennent loin des confrontat­ions redondante­s. On sent, au contraire, que les paroles de l’une font leur bout de chemin dans la tête des deux autres, ce qui démontre, d’une part, la profondeur et le côté songé de la pièce, et de l’autre, que le féminisme peut prendre une panoplie de formes.

Apologia, pièce d’origine britanniqu­e écrite par Alexi Kaye Campbell et traduite en français par Angélique Patterson et Jenny Montgomery, est une oeuvre puissante en ce qui a trait aux ambitions, aux conviction­s et à la famille, le tout d’un point de vue féministe rafraîchis­sant et nuancé. L’oeuvre est présentée jusqu’au 23 mars, au Théâtre La Bordée.

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PHOTO FOURNIE PAR NICOLA-FRANK VACHON Une scène de la pièce Apologia.

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