Macron assume de bousculer les alliés de Kyïv
Le président de la République française a mis en garde les Occidentaux de « ne pas être lâches »
PRAGUE | (AFP) Emmanuel Macron a jugé hier à Prague « nécessaire » de bousculer les alliés de l’ukraine, qu’il a exhortés à « ne pas être lâches » face à une Russie, assurant « assumer » ses propos controversés sur la possibilité d’envoyer des troupes occidentales dans ce pays en guerre.
« Si chaque jour nous expliquons quelles sont nos limites » face au président russe Vladimir Poutine qui, lui, « n’en a aucune », « je peux déjà vous dire que l’esprit de défaite est là qui rôde », a prévenu le chef de l’état français en République tchèque.
« J’assume pleinement » le « sursaut stratégique auquel j’ai appelé », a-t-il martelé lors d’une conférence de presse, estimant que l’europe « avait besoin » de la clarté de ses propos.
Quitte à bousculer ses alliés ? « Je pense que c’est nécessaire », car « si on est passif, le risque qu’on court c’est de subir », a-t-il ensuite dit à quelques journalistes en fin de visite, appelant à « reprendre de l’initiative ».
Le président tchèque, Petr Pavel, lui a apporté son soutien, se disant « favorable à la recherche de nouvelles options, y compris un débat sur une présence potentielle en Ukraine », sans toutefois franchir la ligne rouge du déploiement de « troupes combattantes ».
Un satisfecit qui tranche avec le trouble semé par Emmanuel Macron lorsque le 26 février, à l’issue d’une conférence internationale à Paris, il avait évoqué une « ambiguïté stratégique » pour que Moscou sache que tout sera fait pour l’empêcher de « gagner cette guerre ».
Il avait alors expliqué que l’envoi en Ukraine de militaires occidentaux ne pouvait pas « être exclu » à l’avenir, même s’il avait reconnu qu’il n’existait pas de consensus à l’heure actuelle.
Des États-unis à l’allemagne, la grande majorité des autres alliés s’étaient succédé pour se démarquer de ces propos et assurer qu’il n’était pas question d’envoyer des soldats sur le sol ukrainien, offrant une image de division du camp occidental.
INITIATIVE TCHÈQUE
Vladimir Poutine a mis en garde contre une « menace réelle » de guerre nucléaire en cas d’escalade.
« Nous ne voulons pas d’escalade », a répondu à distance depuis Prague le président français.
Mais il a aussi mis en garde face au risque de cécité devant « les drames qui viennent ». « Il nous faudra être à la hauteur de l’histoire et du courage qu’elle implique », a-t-il prévenu, estimant que l’europe entrait dans un moment « où il conviendra de ne pas être lâches ».
L’avertissement n’a pas été apprécié par l’allemagne, après déjà une série de tensions récentes sur le dossier ukrainien.
« Nous n’avons pas besoin […] de discussions sur le fait d’avoir plus ou moins de courage », a réagi le ministre allemand de la Défense Boris Pistorius. « Cela n’aide pas vraiment à résoudre les problèmes » de l’ukraine.
Emmanuel Macron a assuré que Berlin n’était pas visé particulièrement. « Ça vise tout le monde », a-t-il dit.
APPUI MILITAIRE
Le dirigeant français, qui doit se rendre en Ukraine d’ici mi-mars, semble de plus en plus vouloir imposer son leadership dans le soutien à Kyïv et le bras de fer avec la Russie.
Il y a une semaine à Paris, il avait esquissé plusieurs pistes pour renforcer l’appui militaire fourni à l’armée ukrainienne, qui essuie des revers sur le front.
Les ministres français des Affaires étrangères et de la Défense réuniront leurs homologues des autres pays alliés demain par vidéoconférence pour détailler ces solutions.
Parmi elles figure une initiative tchèque visant à acheter des munitions hors Union européenne.
Le président a aussi signé avec le premier ministre tchèque, Petr Fiala, un plan d’action 2024-2028 pour le partenariat stratégique bilatéral.