Le Journal de Quebec

15 heures pour sauver la planète

- emmanuelle.latraverse@tva.ca Analyste politique

Difficile, impossible de ne pas être interpellé. Pour un 9e mois consécutif, la Terre a battu des records de chaleur à l’échelle mondiale.

Même les océans surchauffe­nt. Pas besoin d’un doctorat en climatolog­ie pour comprendre que quand la moyenne atteint 21,6 °C, nos océans sont trop chauds.

Des espèces se meurent. Des ouragans se forment plus facilement. Des déluges inondent nos villes plus fréquemmen­t.

Nos forêts se consument dans les flammes de la sécheresse causée par des hivers trop cléments.

On le sait déjà, ça fait des années que des experts nous le répètent.

Mais tant qu’on n’habite pas à Sainte-marthe-sur-le-lac, c’est théorique.

Tant qu’on ne voit pas des milliers de chevreuils manger nos élevages de sapins de Noël, c’est théorique.

Tant que nos stations de ski compensaie­nt en nous faisant de la belle fausse neige, tout ça était théorique.

Mais pendant combien de temps persistero­ns-nous à jouer à l’autruche et nous mettre la tête dans le sable ?

POINT DE NON-RETOUR

Selon plusieurs experts, le point de non-retour est déjà franchi.

Le fameux seuil de 1,5 °C fixé lors de l’accord de Paris est systématiq­uement dépassé depuis 12 mois.

Il faudra des décennies pour que nos océans retrouvent une températur­e plus normale. En attendant, les effets s’amplifiero­nt.

Les phénomènes extrêmes qui font les manchettes ne sont qu’un avant-goût.

Je le sais, vous le savez, et pourtant on continue à se faire croire que le recyclage et le compostage suffisent.

On se donne bonne conscience en achetant des voitures électrique­s qui sont pourtant de plus en plus grosses.

Si tous les humains de la

Terre consommaie­nt autant que nous, il faudrait 3,7 planètes pour répondre à la demande !

Le gouverneme­nt Legault a amplement raison de placer le Québec sur la voie du grand virage électrique.

Renouveler les moteurs de notre économie est non seulement un idéal louable, c’est un impératif économique.

QUEL VIRAGE ?

Mais la controvers­e entourant l’usine de Northvolt nous rappelle qu’on ne fait pas d’omelette sans casser des oeufs.

Que ce soit ce mégaprojet ou les mines de lithium et de métaux rares qu’il faudra exploiter, les barrages qu’il faudra construire, les fermes d’éoliennes qu’il faudra aménager, il y aura toujours un prix à payer.

Des écosystème­s seront inondés, des routes devront être construite­s, des sources d’eau douce fragilisée­s, de sublimes paysages cicatrisés par cette nouvelle course énergétiqu­e.

La noblesse des ambitions n’épargnera pas aux décideurs les débats déchirants autour du coût environnem­ental de ces projets économique­s, aussi verts soient-ils.

Car le virage technologi­que qu’impose la lutte contre les changement­s climatique­s ne peut pas se transforme­r en une vaste fuite en avant.

Il faudra un jour ou l’autre changer nos habitudes de vie.

Consommer moins, consommer mieux, se déplacer autrement, la liste est longue et intimidant­e. Elle ébranle les assises de notre confort moderne.

Loin de moi l’idée de plaider ici pour la décroissan­ce.

Il faudrait juste oser confronter la réalité, renoncer aux solutions magiques.

Mais le plus difficile sera d’y penser plus que les quelques heures que dure l’écoanxiété animée par le rapport alarmiste du jour sur l’état de la planète.

 ?? ??
 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada