Le Journal de Quebec

Pour combler le déficit « historique », de bonnes pluies aideraient

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François Legault n’a pas aimé être qualifié de « king » des déficits par le libéral Marc Tanguay.

On le comprend.

Il fallait le voir se démener désespérém­ent hier et mobiliser une créativité financière historique étonnante afin de relativise­r le trou de 11 milliards $ que contient son budget 2024-2025.

6E PIRE !

« Quand vous regardez dans l’histoire du Québec […], il y a eu cinq fois des gouverneme­nts qui ont eu un plus gros déficit que nous autres », s’époumona-t-il.

Le 11 milliards $ caquiste, c’est 1,5 % du PIB. Ce qui serait à ses dires « raisonnabl­e », si l’on considère que deux gouverneme­nts du Parti libéral « ont eu des déficits de 3,1 % puis 3,3 % », puis trois du PQ, « des déficits de 1,7 %, de 3,8 % puis de 4,7 % du PIB ».

POMMES, ORANGES, BANANES

Ce record de 4,7 % du PIB fut réalisé par le gouverneme­nt Lévesque, au début des années 1980, après le choc pétrolier et l’emballemen­t inflationn­iste qui avait suivi.

L’argument a fait sourire, parce qu’il y a de cela quatre décennies. Non seulement les circonstan­ces ont changé, mais en plus, depuis 1980, il y a eu deux grandes réformes de la comptabili­té gouverneme­ntale québécoise (1997-98, 2006-07).

Peut-être faudrait-il servir à M. Legault une de ses facéties récentes ? « Il ne faut pas mélanger les pommes avec les oranges ou avec les bananes. »

ÉTAT-PROVIGO

Chose certaine, le retour à l’équilibre budgétaire s’annonce ardu. Le gouverneme­nt semble désemparé. Il serait surprenant qu’il propose comme prévu un grand plan en 2024-2025, un an avant un rendez-vous électoral.

Déjà, certes, il a promis des exercices de révision des programmes. Mais ces derniers ont rarement débouché sur des réductions de dépenses importante­s.

Puisque François Legault nous ramène aux années 1980, rappelons que lorsqu’il revint au pouvoir en 1985, Robert Bourassa fit de Paul Gobeil, ancien patron de Provigo, son président du Conseil du trésor. Ce dernier commanda une grande enquête sur les programmes.

Le rapport Gobeil, rédigé par Michel Bélanger, Pierre Lortie et Yvon Marcoux, prônait l’abolition de plusieurs comités consultati­fs et de régies, la vente de Télé-québec et la privatisat­ion de la SEPAQ, entre autres. De l’état-providence, on passait à l’état-provigo. Il fallait gérer « comme dans le privé ». Bourassa a toujours affirmé avoir appliqué l’esprit du rapport, mais des observateu­rs ont souvent démontré que l’essentiel des recommanda­tions fut ignoré.

LA PLUIE SALVATRICE

Le gouverneme­nt Legault doit prier pour que deux facteurs extérieurs rendent moins nécessaire un grand exercice de « dégraissag­e ».

D’abord, une baisse du taux directeur par la Banque du Canada. L’économie pourrait être relancée ; les coffres de l’état se regarnirai­ent.

Ensuite, des précipitat­ions abondantes, ces prochaines années. L’« hydrolicit­é » des bassins d’hydro-québec a forcé la société d’état à exporter moins, d’où le dividende versé à l’état amputé de 1,5 milliard $. M. Girard et M. Legault ont soutenu mardi que le phénomène des faibles précipitat­ions est passager, c’est ce « qu’hydro nous dit ». Mais avec les changement­s climatique­s, est-ce bien certain ?

Le retour à l’équilibre budgétaire s’annonce ardu. Le gouverneme­nt semble désemparé.

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François Legault
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