Bannir Tiktok pourrait avoir des impacts ici
Une experte québécoise des médias socionumériques fait une mise en garde sur la décision des États-unis
Même si les chances sont minces, une experte en médias socionumériques estime qu’une possible interdiction du réseau social Tiktok aux États-unis aurait des conséquences sérieuses pour les internautes du Québec.
« Ça serait dramatique aussi pour les Québécois, si la loi est adoptée. Elle obligerait nos créateurs de contenu, comme des entreprises ou des influenceurs, à se tourner vers Meta à l’avenir pour toucher le public américain », explique Laurence Grondin-robillard, chargée de cours et doctorante en communication de l’université du Québec à Montréal (UQAM).
La Chambre américaine des représentants a entériné mercredi une proposition de loi qui prévoit bannir le réseau social chinois des Étatsunis s’il n’est pas vendu.
C’est maintenant au tour du Sénat d’examiner ce projet de loi et de voter à son sujet. Selon le New York Times, même si la loi est adoptée, il est fort probable qu’elle sera contestée devant les tribunaux.
« Rien n’est encore joué. Ceci étant dit, Tiktok s’est toujours montrée ouverte aux dialogues dans le passé et la plateforme pourrait bien trouver une façon de ne pas se rendre à ce point. Ça demeure une grosse menace », estime Mme Grondin-robillard, qui écrit une thèse centrée sur Tiktok.
SOUPÇONNÉE D’ESPIONNAGE
Tiktok est visée par les autorités américaines depuis plusieurs mois. De nombreux élus estiment que la plateforme de vidéos courtes permet à la Chine d’espionner et de manipuler ses 170 millions d’utilisateurs aux États-unis.
La société a nié, à plusieurs reprises, avoir transmis de telles informations à Pékin.
« [Le projet de loi] vise à résoudre des questions légitimes de sécurité nationale et de protection des données liées aux rapports du Parti communiste chinois avec Tiktok », a mentionné le chef des démocrates à la Chambre des représentants, Hakeem Jeffries.
Un peu avant le vote, hier, la Chine a indiqué dans un communiqué que d’interdire Tiktok aux États-unis équivaudrait à « se tirer une balle dans le pied » pour la première puissance mondiale.
Notons que le projet de loi américain oblige carrément l’application à couper tous ses liens avec sa maison-mère, nommée Bytedance, et plus largement avec la Chine.
Laurence Grondin-robillard se dit aussi inquiète pour les utilisateurs québécois qui s’informent principalement sur Tiktok si le réseau social est finalement banni.
Ces internautes n’auraient donc plus accès aux médias américains.
« Cinq pour cent des Canadiens consultent leurs nouvelles sur cette plateforme. Ça paraît peu, mais c’est beaucoup puisque ça représente une tranche d’âge spécifique. […] Avec le blocage des nouvelles sur Facebook et Instagram, on peut présumer que cette tendance est en hausse », note celle qui se spécialise en impacts sociopolitiques des médias socionumériques.