Un balisticien a imploré la Couronne de tenir un procès
Il s’opposait à un règlement puisqu’il était convaincu que Delisle avait tué sa femme
Convaincu que Jacques Delisle avait assassiné sa femme, un expert de la Couronne qui a travaillé durant des années sur le dossier a imploré en 2021 le Directeur des poursuites criminelles et pénales de ne pas accepter de règlement et de tenir un procès dans cette affaire.
« Aucune erreur judiciaire n’a été commise », écrivait le balisticien Guillaume Arnet, du Laboratoire de sciences judiciaires et de médecine légale, dans un courriel envoyé le 7 mai 2021 au bureau du Directeur des poursuites criminelles et pénales (DPCP).
Ce courriel, qui était jusqu’ici frappé d’une ordonnance de non-publication, a été rédigé dans les semaines suivant l’annonce d’un nouveau procès dans ce dossier en avril 2021, à la suite d’une longue révision ministérielle.
Dès lors, l’avocat de Jacques Delisle, Me Jacques Larochelle, avait évoqué le souhait de trouver un terrain d’entente avec la Couronne, pour éviter que leur client n’ait à subir ce second procès.
« J’entends que le DPCP est en attente d’un règlement possible avec Me Larochelle, que justice ne sera peutêtre pas rendue pour tous ceux qui ont été impliqués dans ce dossier et surtout pour Mme Nicole Rainville, abattue d’une balle dans la tête par son mari Jacques Delisle le 12 novembre 2009 au matin », soutenait Guillaume Arnet.
IL VOULAIT TÉMOIGNER
Le travail des experts du Laboratoire avait été malmené par le clan Delisle au cours des dernières années et le balisticien tenait à ce que lui et son équipe se fassent entendre dans le cadre d’un nouveau procès.
Selon lui, son rapport à venir dans cette affaire ainsi que les expertises de scientifiques européens, déjà mandatés par le DPCP en vue de ce second procès, permettraient que « justice » soit rendue.
« En empêchant la tenue de ce procès, ce sont ultimement nos noms et notre institution qui seront ternis, alors qu’il n’aura jamais été aussi évident que nous avons bien travaillé, et que la démonstration finale et sans équivoque est plus que jamais à portée de main », écrivait-il.
Dans les faits toutefois, aucune discussion n’a eu lieu à cette époque entre les parties, a confirmé jeudi le procureur de la Couronne au dossier, Me François Godin.
Il faudra attendre à l’automne 2023, soit plus de deux ans plus tard, avant que ne s’entament des séances de facilitation qui ont mené, jeudi, a la reconnaissance de culpabilité de Jacques Delisle pour l’homicide involontaire de son épouse.
UN RAPPORT CONFIDENTIEL
Notons que dans sa missive, Guillaume Arnet insistait aussi sur le fait que le rapport commandé par le ministre fédéral de la Justice lors du processus de révision judiciaire écartait le fait que Jacques Delisle avait été victime d’une erreur judiciaire, comme le rapportait hier notre Bureau d’enquête.
À la suite de ce courriel, qualifié d’« odieux » par les avocats de Jacques Delisle, Guillaume Arnet a été écarté du dossier Delisle, son objectivité étant mise à mal.
Guillaume Arnet a refusé notre demande d’entrevue.