UNE ENQUÊTE DÉCLENCHÉE
Des chandails de la LHJMQ arborant des mots uniquement en anglais causent de vives réactions
Le gouvernement du Québec juge inacceptable que des joueurs de la Ligue de hockey junior Maritimes Québec (LHJMQ) portent un chandail affichant uniquement des termes en anglais. L’office québécois de la langue française enquêtera.
Mercredi soir, le chef péquiste, Paul St-pierre Plamondon, a relayé sur les réseaux sociaux des images montrant des joueurs des Voltigeurs de Drummondville afficher des chandails avec du texte uniquement en anglais indiquant « Gilles - Courteau Trophy playoffs ».
Une autre photo des Saguenéens de Chicoutimi montrait également des lettrages dans le vestiaire imprimés exclusivement en anglais.
« La LHJMQ a récemment changé de nom et de commissaire et de langue commune officielle ? C’est très inquiétant de voir que la ligue ne fait pas son travail à ce point. Même le Canadien de Montréal, qui évolue dans une ligue nord-américaine de portée internationale, n’a jamais osé aller aussi loin dans son manque de considération envers le français », affirmait le chef du PQ, ajoutant que « la LHJMQ est la ligue québécoise responsable du développement de nos jeunes joueurs québécois. Sa langue commune et officielle devrait être le français ».
« UN EFFORT » DEMANDÉ
L’affaire a rebondi à l’assemblée nationale hier. Le ministre responsable de la Langue française, Jean-françois Roberge, affirme que les dirigeants de la Ligue doivent faire mieux et doivent corriger la manière dont ils travaillent.
« On a adopté une loi qui précise que le français est la seule langue officielle, la seule langue commune au Québec. […] Je vais demander dans les prochaines heures à l’office québécois de la langue française de se pencher sur la question et d’analyser la situation », a-t-il signalé. L’office a décidé d’enquêter.
La ministre déléguée aux Sports, Isabelle Charest, demande à la LHJMQ de faire « un effort de francisation » auprès des joueurs parce qu’au Québec, « on parle en français ».
« Il peut y avoir l’utilisation de l’anglais, ça arrive, je viens du milieu sportif. Ça arrivait, c’était la langue universelle.
Par contre, je pense que dans les communications, dans les efforts qui sont faits pour faire connaître la Ligue, c’est un fleuron du Québec », a-t-elle dit, soutenant qu’elle n’avait toutefois aucun recours à titre de ministre déléguée.
LA LIGUE SE DÉFEND
Dans un message envoyé à Paul St-pierre Plamondon sur le réseau X mercredi soir, la Ligue admet que l’affichage aurait dû être bilingue, défendant toutefois l’usage de la langue de Shakespeare pour plonger les joueurs dans un environnement professionnel.
« Dans les vestiaires de la LHJMQ, les joueurs viennent d’un peu partout dans le monde, alors l’anglais est fréquemment utilisé pour rejoindre nos joueurs. Parmi les objectifs de la Ligue, il y a celui de préparer nos joueurs étudiants aux circuits professionnels dans lesquels la langue d’usage est l’anglais. Nous devons ainsi les plonger dans un environnement similaire à celui des circuits dans lesquels ils rêvent d’évoluer », a affirmé le directeur des communications de la ligue, Raphaël Doucet.
Le ministre de la Justice, Simon Jolin-barrette, estime que les propos du directeur des communications sont inacceptables.
« UN AFFRONT »
« Ça n’a pas de bon sens, c’est un affront aux Québécois », a-t-il affirmé.
De leur côté, les Voltigeurs de Drummondville ont souligné dans un communiqué que le français sera toujours d’une importance capitale dans leur organisation.
« Nos communications, nos réseaux sociaux, nos relations avec partisans et partenaires se font uniquement en français. La Ligue de hockey junior Maritimes Québec (LHJMQ), dont les Voltigeurs font partie, est une ligue qui opère dans quatre territoires et dans certains cas précis, l’interaction avec les joueurs et l’affichage est faite de façon à représenter ce bilinguisme », a écrit David Boies, le directeur des opérations des Voltigeurs.
Les équipes de hockey scolaire devront vraisemblablement se conformer à la loi 101 et retirer les slogans anglophones qui tapissent les vestiaires comme celui du Blizzard du Séminaire Saintfrançois à Québec. Le directeur plaide que ça se fera « au détriment des petits kids ».
D’ici le 1er juin 2025, le français devra apparaître de façon « nettement prédominante » dans l’affichage. De plus, les institutions, comme les PME de 25 à 99 employés, ont l’obligation de créer un comité de francisation.
Québec a d’ailleurs demandé à l’office québécois de la langue française (OQLF) d’enquêter sur l’usage de l’anglais sur les chandails et dans les vestiaires d’équipes de la Ligue de hockey junior Maritimes Québec (LHJMQ) hier, rappelant que la seule langue officielle au Québec est le français.
Notre Bureau parlementaire a aussi appris que l’office a demandé à des écoles privées, comme le Séminaire Saint-françois (SSF), de se conformer à la nouvelle loi 101.
« On a reçu les missives de l’office de la langue française, ça ne fait même pas six semaines. On est en train de compléter la mise en place d’un comité », a expliqué en entrevue le directeur de l’école, Luc Savoie.
TEAM FIRST
Ainsi, l’école privée devra sans doute traduire les nombreux slogans de motivation qui ornent en grosses lettres le vestiaire du Blizzard Midget AAA, ou les retirer.
Compete every day, never satisfied, team first : des messages inscrits qu’en anglais.
Pourquoi utiliser l’anglais ? « Ce sont des pratiques sportives qui existent depuis des lunes et que les jeunes apprécient [et] qui sont sincèrement beaucoup plus faciles à imager en anglais qu’en français, a signalé le directeur Savoie. Comme au football on va dire “bring it”... Mais là on va dire “amène-le”. Ç’a moins d’impact. Ce n’est pas de la mauvaise volonté, mais ça fait partie du sport partout au Québec, partout en Amérique du Nord et peut-être même dans le monde. »
Le directeur du SSF a confirmé que l’établissement se conformerait.
« On va faire en sorte de se conformer à l’ensemble des règles qui sont obligées par l’office de la langue française pour rentrer dans les règles et faire en sorte que la loi est respectée à l’école », a-t-il signalé.
« On n’aura pas le choix, c’est une loi. Je connais la game politique et de l’image. Sincèrement, je pense que c’est au détriment des petits kids. Ici, c’est une école française. On parle français, ça fait partie de notre cursus pédagogique. À partir de là, on va écrire ça en français. Le monde va chialer, ils ne seront pas contents, mais ça va être de même. On va se plier à la loi comme celle de l’égalité à l’emploi, la rougeole et compagnie. C’est une après l’autre, l’éclipse... et mettez-en. »
Il croit d’ailleurs que l’office viendra « probablement » analyser les lieux. Il demande à l’organisation de « laisser le temps aux compagnies et aux institutions de s’ajuster ».
PAS D’EXCEPTION DANS LES VESTIAIRES
L’OQLF rappelle que les vestiaires ne font pas exception aux règles d’affichage.
« La règle générale en matière d’affichage public et de publicité commerciale est que ces derniers doivent être en français. Ils peuvent être faits à la fois en français et dans une autre langue pourvu que le français y figure de façon nettement prédominante. La Charte et ses règlements ne prévoient pas d’exception pour les vestiaires », a indiqué Chantal Bouchard, la porte-parole de L’OQLF.