Benoît Pelletier : un homme de réflexion et d’action
Cette saloperie de COVID lui avait fait frôler la mort à peine au début de la soixantaine, mais Benoît Pelletier avait réussi à la faire mentir. Depuis, on le croyait indestructible. Samedi, il a pourtant quitté ce monde beaucoup trop tôt.
Homme de réflexion et d’analyse, Benoît Pelletier était un constitutionnaliste et un professeur de renom. Également un homme d’action et de convictions, il plongera dans l’arène politique en
1998 sous la bannière libérale.
Prenant le pouvoir en 2003, Jean Charest le nomme alors ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes. Le poste lui ira comme un gant.
Il y portera également à bout de bras une défense acharnée des droits de la francophonie canadienne et des Premières Nations.
Capable d’échanger dans le respect avec tous, y compris ses adversaires politiques, Benoît Pelletier était de loin le moins partisan des élus.
Dans ses classes comme dans les médias, il était pédagogue jusqu’au bout des doigts. Intellectuel véritable, il était doté d’une pensée nuancée. Il nichait clairement aux antipodes de la polarisation ambiante.
Passionné de la langue française et du Québec, il cherchait inlassablement à les renforcer tous deux au sein du Canada. En cela, il était l’incarnation de l’esprit même du défunt Accord du lac Meech.
TOUCHANT ET VRAI
Il croyait aussi dur comme fer à une constitution pleinement québécoise compatible avec la dynamique politique canadienne. Dommage qu’aucun premier ministre ne l’ait compris autant que lui.
Imaginatif comme pas un, malgré de multiples échecs constitutionnels crève-coeur, Benoît Pelletier préférait voir le verre à moitié plein. Jamais à moitié vide. En fait, il était comme ça, aussi, dans la vie.
Toujours prêt à s’émerveiller d’une pensée ou d’une découverte, d’accord ou non avec sa vision politique, il y avait chez lui quelque chose de profondément touchant et de très vrai.
Avec son épouse et leurs quatre enfants, Benoît Pelletier, aussi un globe-trotter redoutable, était avant tout un homme de famille. Un mari aimant et loyal. Un père dévoué. La combinaison rêvée.
Pour tout dire, Benoît Pelletier était un être à la fois charmant, cultivé, raffiné, érudit, aimable, doux, pacifique, drôle et chaleureux. Toujours le regard allumé et le sourire fin prêt à vous accueillir.
L’ÉTINCELLE DANS LE REGARD
Je l’ai vu pour la dernière fois à la mi-mars. Il était présent à Montréal au lancement très couru du livre Àla conquête du pouvoir de Pascal Mailhot et Éric Montigny.
Quand je l’ai aperçu discutant avec le ministre de la Justice, Simon Jolin-barrette, je suis allée le saluer avec plaisir. Je l’ai remercié pour ses analyses toujours éclairantes.
Fidèle à lui-même, il m’a souri, a rougi un peu et m’a remerciée tout en me retournant généreusement le compliment.
En voyant l’étincelle dans ses yeux, je lui ai surtout dit à quel point j’étais heureuse qu’il ait pu survivre à l’horrible virus qui avait failli l’emporter.
« Ne nous refaites plus le coup, que je lui ai dit à l’oreille, on a trop besoin de vous. Promettez-moi que vous resterez parmi nous encore très, très longtemps. » Si seulement ce souhait s’était réalisé…
Mes condoléances à son épouse, ses enfants, toute sa famille et ses proches. Sachez que nous serons nombreux à porter Benoît Pelletier dans nos pensées.