Le Journal de Quebec

L’octroi de primes et de bonis est-il un droit ?

-

Un lecteur déçu de s’être vu refuser son boni pour l’année 2023 au motif qu’il a démissionn­é en 2024 se demande si son employeur avait raison d’agir ainsi.

En fait, la question du droit à un boni ou à une prime est beaucoup plus complexe qu’il n’y paraît à première vue.

LE CAS DU BONI

Il peut exister diverses formes de bonis. La plupart du temps, celui-ci relève de la discrétion de l’employeur, qui possède alors seul le pouvoir de décider qui en sera bénéficiai­re et selon quelles conditions.

Par ailleurs, un employeur fera généraleme­nt dépendre l’octroi d’un boni de l’un ou de l’autre des facteurs suivants :

■ La performanc­e de l’entreprise justifie-t-elle, pour une année particuliè­re, la remise d’une partie des profits à l’ensemble de ses employés ? Si la réponse à cette question est positive, l’employeur pourra déterminer de quelle façon sera distribué le boni dont il est ici question, par exemple en fonction du nombre d’heures travaillée­s, du poste occupé, des objectifs préétablis, etc.

■ L’autre type de boni dépend directemen­t de la performanc­e de chaque employé, établie à partir de ses résultats personnels, notamment de l’atteinte d’objectifs qui lui avaient été déterminés.

Bien que la loi ne prévoie pas la façon d’encadrer l’octroi des bonis, un employeur a intérêt à adopter une politique à ce sujet, connue des employés et qui pourra faire partie des conditions de travail ou être intégrée à la convention collective.

Si on en revenait à la question de notre lecteur déçu, il peut très bien arriver que l’une des conditions permettant l’octroi d’un boni soit le fait que l’employé demeure à l’emploi de son entreprise. Dans ce cas, selon les circonstan­ces, il se peut que l’employeur ait raison.

Malgré son large pouvoir discrétion­naire, il peut parfois arriver que l’employeur soit obligé de verser le boni. Ce sera le cas si par le passé cette discrétion fut systématiq­uement exercée en faveur de l’employé, peu importe les circonstan­ces. On considérer­a alors que le boni fait partie intégrante de la rémunérati­on.

Pour le cas où un employé a été injustemen­t congédié, il pourra avoir tout de même droit à son boni, suivant les circonstan­ces.

LE CAS DE LA PRIME

De façon générale, les tribunaux estiment que pour avoir droit à une prime, un employé doit effectuer des tâches autres que celles qui sont normales ou habituelle­s en regard de son titre d’emploi.

Selon les tribunaux, une prime n’a pas à être versée pour un travail déjà effectué, car une prime n’est pas un salaire, « mais plutôt un supplément pour compenser un surplus de travail ou un inconvénie­nt subi » (Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 1575 c. Université du Québec à Rimouski, 2022 CANLII 88646).

De même, les tribunaux ont également décidé que les clauses d’un contrat de travail ou d’une convention collective concernant les primes doivent être interprété­es restrictiv­ement, puisqu’elles constituen­t un régime d’exception ou particulie­r par rapport au régime général de rémunérati­on. Cependant, même une interpréta­tion restrictiv­e ne doit pas être un moyen détourné de refuser le versement d’une prime à un employé qui respecte intégralem­ent ses conditions de travail et les exigences de son emploi.

En conclusion, la meilleure façon d’éviter les litiges concernant l’octroi des primes ou des bonis consiste à prévoir, dans un contrat ou une convention collective, quelles en seraient les conditions d’exercice.

 ?? ??
 ?? ??

Newspapers in French

Newspapers from Canada