Le Journal de Quebec

Les délais d’attente stagnent et le vieillisse­ment de la population va empirer la situation Vous n’avez pas fini d’attendre dans

- HÉLOÏSE ARCHAMBAUL­T

Les Québécois doivent prendre leur mal en patience : les délais d’attente stagnent dans les urgences embourbées de la province et le vieillisse­ment de la population ne fera qu’empirer la situation dans les prochaines années.

« La population vieillit. On peut probableme­nt juste limiter les dégâts, mais ça n’ira pas bien, résume Patrick Déry, spécialisé dans l’analyse des politiques de santé. Beaucoup de profession­nels vont prendre leur retraite, les besoins vont augmenter plus vite. »

« C’est inévitable qu’il y aura plus de personnes âgées à l’urgence, à moins qu’on prenne des mesures », croit aussi le Dr Jacques Morin, président de l’associatio­n des gériatres du Québec.

ON A PRESQUE ATTEINT L’OBJECTIF

Voilà plusieurs décennies que l’attente à l’urgence est un problème au Québec. La dernière année (avril 2023 à mars 2024) ne fait pas exception à la règle, montrent les données du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS).

En moyenne, les Québécois ont patienté 17,4 heures sur une civière avant d’avoir un lit à l’étage, soit à peine plus que l’objectif, fixé à 17 heures.

« Youpi ! On a atteint le 17 heures, ironise M. Déry. Mais, ça n’a pas d’allure 17 heures ! »

Dans la région de Montréal, la majorité des hôpitaux ont dépassé les 20 heures, voire 30 heures.

« Il n’y a pas eu beaucoup d’améliorati­on dans le système cette année », avoue le Dr Gilbert Boucher, président de l’associatio­n des spécialist­es en médecine d’urgence du Québec (ASMUQ).

Chaque semaine, des patients frôlent la mort parce que leur état s’est gravement détérioré, constate L’ASMUQ. Quand les urgences sont très bondées, la pression est forte sur les soignants, qui craignent de mauvais triages.

Par ailleurs, beaucoup de patients passent plus de 24 heures sur une civière,dont certains plusieurs jours, alors que la cible est de zéro. Chez les aînés, cette attente entraîne toutes sortes de problèmes (perte mobilité, confusion, etc.).

Entre 2021 et 2030, la population de 65 ans et plus passera de 20,5 % à 25 %, selon l’institut national de santé publique du Québec. Elle était de 9 % en 1980. Déjà, les médecins constatent que la hausse presse sur le système.

« TOUT DEVIENT PLUS COMPLIQUÉ »

« C’est inévitable, les patients sont de plus en plus lourds, soutient le Dr Boucher. La personne âgée qui arrive un peu mélangée à l’urgence, après 24 heures, tout devient plus compliqué. »

Selon plusieurs, il est impératif de soigner le plus de gens possible à l’extérieur des urgences (cliniques, soins à domicile, etc.). Mardi, le MSSS a annoncé la création de cliniques gériatriqu­es. « Il faut améliorer la fluidité du système, sinon le problème perdure. Ça coûte plus cher de ne pas s’en occuper », résume le Dr Morin.

Malgré le sombre portrait, le Dr Boucher constate que les directions d’hôpitaux semblent mobilisées pour désengorge­r les urgences. « On voit un réel désir de s’améliorer. […] Quand les PDG décident de prendre leur bateau et de le diriger, d’habitude il y a des résultats. »

Le délai de prise en charge à l’urgence pour voir un médecin était de 2 h 48 en 2023-2024, il a donc presque atteint l’objectif (2 h 45). Or, cette cible avait été revue à la hausse. Selon le plan stratégiqu­e du MSSS, un retour à 90 minutes est prévu dans trois ans.

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PHOTOS D’ARCHIVES Entre avril 2023 et mars 2024, les Québécois ont attendu en moyenne 17,4 heures sur une civière avant d’obtenir un lit à l’étage.
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Dr GILBERT BOUCHER Président de L’ASMUQ

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