« Tu as tué mon père pour une bouteille de vin »
Le fils d’une victime a témoigné hier devant la chauffarde qui a heurté à mort deux personnes
« Je sais qu’on a tous un destin, mais perdre son seul enfant de cette manière, c’est difficile. On a été obligés de donner la vie de notre fille pour que vous finissiez par comprendre. »
– Hélène Morin et Michel Michaud, parents d’audrey Michaud
« À tonâge, j’aurais préféré 1000 fois affronter mes problèmes que regarder mes enfants et mes petitsenfants grandir à travers des barreaux. »
– Jayden Lacoursière, fils de Samuel Lacoursière
Martine Linteau a affronté hier les proches des deux personnes qu’elle a fauchées, saoule au volant, en juillet 2023, qui, malgré tous les remords qu’a pu démontrer l’accusée, ne lui pardonnent pas « son égoïsme ».
« Ton égoïsme a tué mon père. »
C’est dans ces mots durs que s’est adressé à Martine Linteau le fils de Samuel Lacoursière, Jayden.
L’adolescent de 15 ans a pris la barre pour rappeler à l’accusée que la bouteille de vin qu’elle allait se chercher le jour où elle a fauché son père ne vaudra jamais les années de solitude qui l’attendent.
« Il était mon pilier. […] Il ne verra jamais ma graduation, mon appartement ou ma maison, il n’aura jamais vu mes enfants et ne me dira plus jamais qu’il est fier de moi », a relaté avec force le jeune homme.
DOUBLE DE LA LIMITE PERMISE
Samuel Lacoursière a péri, tout comme son amie Audrey Michaud, lorsque la moto sur laquelle ils se trouvaient a été fauchée par Martine Linteau le 25 juillet 2023.
Cette dernière avait plaidé coupable en décembre dernier à deux chefs d’accusation de conduite avec les facultés affaiblies causant la mort.
La violente collision était survenue à Saint-raymond alors que la chauffarde avait près du double de la limite permise d’alcool dans le sang.
Elle avait pris le volant pour retourner s’acheter une deuxième bouteille de vin au dépanneur en plein après-midi.
« Vous avez été égoïste, vous n’avez pensé qu’à vous-même, à combler votre vide, vos blessures jamais guéries », a souligné avec émotion la tante d’audrey Michaud, Sylvie Morin, rappelant que la jeune femme, bachelière en psychologie, passait sa vie à aider des gens « en souffrance », qui contrairement à l’accusée, acceptaient de se faire aider.
« Dans votre cas, cela a mené à la perte de notre belle Audrey. »
S’APITOYER SUR SON SORT
Jayden Lacoursière a rappelé que si Martine Linteau avait pu vivre difficilement la perte de ses soeurs comme elle l’a raconté à son enquête sur remise en liberté, son père avait lui aussi vécu des difficultés.
Vétéran de l’afghanistan, Samuel Lacoursière vivait avec un trouble de stress post-traumatique, mais « s’est toujours remis sur ses pieds sans utiliser d’excuses comme son trouble ou la boisson », a insisté son fils avant de s’adresser directement à l’accusée.
« Toi, tu l’as tué pour une bouteille de vin que tu allais boire en t’apitoyant sur ton sort au lieu d’essayer d’améliorer ton cas », lui a lancé l’adolescent en deuil.
Et rappelant les propos de l’accusée qui avait mentionné au tribunal qu’elle trouvait difficile son incarcération, le jeune homme a tout simplement affirmé « n’avoir aucune empathie pour les gens qui n’assument pas leurs torts ».
« Je suis heureux que la prison ne te convienne pas, parce que le trou que tu as laissé dans ma vie ne me convient pas non plus », a laissé tomber l’adolescent.
« Elle dit que la prison n’est pas faite pour elle, mais le cimetière n’était pas fait pour Samuel non plus », a ajouté Louis-philippe Lebel, meilleur ami de la victime.
LA SUITE EN JUILLET
Vu les nombreux témoignages, les avocates au dossier n’ont pu livrer leurs plaidoiries à la juge Marie-claude Gilbert.
Le dossier reviendra donc à la fin juillet pour que les parties présentent à la juge leurs suggestions sur la peine à imposer à la femme de 62 ans.