La taxe carbone cachée vous coûte au moins 6,70 $ par plein d’essence
Voulez-vous me dire pourquoi le gouvernement du Québec cache la taxe sur le carbone qu’il nous charge lorsqu’on fait le plein d’essence ?
En effet, cette taxe carbone de
13,4 cents le litre que les pétrolières refilent aux consommateurs québécois n’apparaît nulle part : elle est cachée dans les prix de gros de l’essence déterminés à la rampe de chargement de Montréal.
Sur chaque plein d’essence que vous faites, mettons de 50 litres dans le cas d’une voiture compacte, vous devez payer 6,70 $ en taxe carbone. Ce sont les pétrolières qui encaissent la taxe carbone. Et ces recettes de la taxe carbone leur permettent de se procurer, du gouvernement du Québec, des droits d’émissions de gaz à effet de serre (GES) en vertu du SPEDE (Système de plafonnement et d’échange de droits d’émissions).
Pour l’exercice budgétaire en cours, celui de 2024-25, le ministre des Finances Eric Girard évalue à 1,5 milliard $ le montant d’argent qu’il retirera de la vente aux enchères des droits d’émissions de gaz à effet de serre. (Pour plus de précisions, je vous invite à lire le texte ci-contre sur le SPEDE.)
LORS DU PLEIN D’ESSENCE
Lorsque vous avez fait le plein cette semaine dans la grande région de Montréal, mettons à 1,78 $ le litre d’essence, le montant des taxes que vous avez payé ne se limitait pas aux 55,4 cents de taxes spécifiques et de taxes de vente qui apparaissaient sur votre facture.
Le vrai montant total des taxes s’élevait plutôt à 68,8 cents lorsqu’on inclut la « discrète » taxe sur le carbone qui est camouflée dans le prix de gros des distributeurs.
Voici le détail des 68,8 cents de taxes que les automobilistes québécois ont payées sur le litre d’essence à 1,78 $ :
■ Taxe provinciale sur le carbone : 13,4 cents
■ Taxe provinciale sur les carburants : 19,2 cents
■ Taxe d’accise fédérale : 10 cents
■ Taxe de vente fédérale (TPS) : 7,8 cents
■ Taxe de vente du Québec (TVQ) : 15,4 cents
■ Taxe pour transport collectif : 3,0 cents
Ainsi, l’ensemble de cette panoplie de taxes sur le litre d’essence représentait 38,7 % du coût !
Plus concrètement, supposons un plein d’essence de 50 litres. Sur une facture de 89,00 $ (50 litres × 1,78 $), la portion des taxes s’élève à 34,44 $, dont :
■ 8,90 $ pour le fédéral
■ 1,50 $ pour le transport collectif
■ 24,00 $ pour Québec (dont 6,70 $ en taxe carbone).
GROSSES RECETTES
Au Québec, les ventes de carburants (essence, diesel) tournent annuellement autour de 11,3 milliards de litres. Juste en ce qui concerne toutes les taxes que le gouvernement du Québec perçoit à la pompe sur l’essence et le diesel, ça représente des recettes de l’ordre de 5,4 milliards $. Et pour le fédéral ? Juste au Québec, c’est au moins un gros 2 milliards $.
Au total, donc, les véhicules à carburant qui circulent sur les routes du Québec rapportent annuellement plus de 7 milliards $ en taxes de tout acabit.
MAIS, AVEC L’AUTO ÉLECTRIQUE...
Avec l’arrivée massive des voitures électriques sur nos routes, qu’arrivera-t-il lorsque Québec commencera à voir s’envoler les milliards de dollars de recettes que lui rapportent sa taxe de 19,2 cents le litre sur les carburants, sa taxe carbone de 13,4 cents le litre, sa TVQ de 15,4 cents le litre ?
Mon petit doigt me dit qu’il va se virer de bord et surtaxera graduellement tout ce qui est relié aux voitures électriques, à savoir l’électricité, l’usure des pneus, les batteries, etc., etc.
LE FONCTIONNEMENT DU SPEDE
Au Québec, la taxe carbone de
13,4 cents le litre d’essence qu’on nous charge va dans les coffres des distributeurs de pétrole. Les recettes qu’ils tirent de la taxe carbone équivalent, grosso modo, au coût d’acquisition des unités d’émissions de gaz à effet de serre (GES) que le gouvernement du Québec vend aux enchères quatre fois par année.
« Les distributeurs de carburants et de combustibles fossiles sont assujettis au SPEDE [Système de plafonnement et d’échange de droits d’émissions], ce qui signifie qu’ils doivent remettre une unité d’émission pour chaque tonne de GES émise par les produits qu’ils distribuent », précise Frédéric Fournier, du ministère de l’environnement, de la Lutte contre les changements climatiques, de la Faune et des Parcs. Évidemment, les distributeurs de pétrole transfèrent aux consommateurs le coût d’acquisition des unités d’émission de GES.
Cela dit, les recettes de taxe sur le carbone perçues par le gouvernement du Québec sont uniquement composées des revenus des ventes aux enchères desdites unités.
Lors de la dernière vente aux enchères, le prix de vente des unités d’émission était de 56 $ l’unité, ce qui équivaut à environ 13,4 cents par litre d’essence.
Toutes les recettes de taxe carbone provenant des ventes aux enchères sont versées au Fonds d’électrification et de changements climatiques du gouvernement.
Et on nous assure que l’argent est entièrement utilisé afin de lutter contre les changements climatiques, comme stipulé dans la Loi sur le ministère du Développement durable, de l’environnement et des Parcs (chapitre M-30.001, article 15.4, paragraphe 5°).
Cette taxe carbone de 13,4 cents le litre que les pétrolières refilent aux consommateurs québécois n’apparaît nulle part : elle est cachée dans les prix de gros de l’essence déterminés à la rampe de chargement de Montréal