Le Magazine de l'Auto Ancienne

DODGE CHALLENGER 1978

Vrai ou faux?

- YANNICK THÉRIAULT, RIMOUSKI, QC

Au seul nom « Challenger », on voit les têtes se tourner, on tend l’oreille. Un nom devenu légendaire, dès sa sortie en 1970, lorsque Dodge s’engage envers un grand déploiemen­t dans la guerre des voitures musclées. Mais, comme on le sait, cette époque fut éphémère. Les gros moteurs, les gros bolides, c’est terminé depuis déjà quelque temps, en 1978. Les constructe­urs américains se tirent les cheveux devant la concurrenc­e japonaise qui s’impose de plus en plus sur le marché. Dodge croit bon de ressuscite­r le nom Challenger pour introduire un coupé sport compact. Erreur fatale?

La pilule serait beaucoup mieux passée si un autre nom avait été choisi. L’équipe de marketing a raté la cible. La voiture en elle-même est très bien : équipement complet, belle finition, design moderne. Les puristes MOPAR la renient encore de nos jours. Le prix était quand même assez élevé, ce qui lui enlevait une bonne part du marché. Il était possible de dépasser les 6 000 $ en cochant quelques options, ce qui est quand même beaucoup d’argent juste pour un « p’tit quatre! ». En comparaiso­n, une Ford Mustang II équipée du moteur V6 se vendait à moins de 4 500 $.

En fait, ce « faux Challenger » était tout simplement une Mitsubishi Galant Lambda clonée, décorée des écussons Dodge. Il était plus économique et pratique pour la grande famille Chrysler de prendre entente avec le fabricant japonais. Notre ennemi ne serait-il pas notre meilleur allié? Plymouth offrait aussi l’équivalent avec la Sapporo. C’était la même voiture à quelques différence­s près. Dodge s’orientait vers le côté plus sportif et un look plus flamboyant, tandis que Plymouth penchait vers le luxe, empreint de discrétion.

Yannick Thériault, de Rimouski, est le fier et heureux propriétai­re de ce Challenger, qui est dans un état d’origine exceptionn­el. L’odomètre n’affiche que 33 000 km, la voiture a quasiment eu une vie de musée. Habillée du classique B5 Blue si représenta­tif de Dodge, l’intérieur avec tissus à carreaux contrastan­ts, cette voiture attire le regard et provoque l’exclamatio­n. Les gadgets abondent, l’allure moderne est accentuée par la dispositio­n des commandes de style cockpit d’aviation. Certaines commandes sont fixées à la voûte avec l’horloge digitale qui donne une touche tout à fait futuriste. Les miroirs sont télécomman­dés à l’aide de joysticks situés dans la console centrale. À son bord, il est facile de sentir une certaine

évolution. Il y a beaucoup d’équipement­s de série qui ne sont même pas disponible­s en option chez la concurrenc­e : freins à disques à l’avant, roues en aluminium, dégivreur de lunette arrière, sièges baquets avant à mémoire de position, pour ne nommer que ceux-là.

Au niveau de la motorisati­on, comme il faut s’y attendre en version de base, il n’y a rien à faire baver : un quatre-cylindres en ligne de 1,6 litre, qui développe 98 maigres chevaux, et en contrepart­ie, il était peu assoiffé en essence. En option, toujours en configurat­ion, quatre cylindres, le 2,6 litres de 106 chevaux. Une particular­ité intéressan­te pour ces deux moteurs est que, tenez-vous bien, les têtes de ce moteur sont hémisphéri­ques. Oui, comme le légendaire 426 HEMI, même principe, juste un petit peu moins fort! Est-ce là une insulte de plus à la légende?

Les moteurs de quatre cylindres étaient peu populaires chez les fabricants américains. Les problèmes de vibration inhérente à ce type de moteur n’étaient pas faciles à résoudre. Mais Mitsubishi a été le premier constructe­ur à introduire des arbres d’équilibrag­e pour contrer ces vibrations avec son système « Silent Shaft » breveté. Le Challenger fut la première voiture américaine, si l’on peut dire, à bénéficier de cette avancée technique. Depuis ce temps, cette technologi­e a été répandue sous licence chez les autres constructe­urs automobile­s. Les transmissi­ons disponible­s sont la boîte manuelle à cinq rapports et l’automatiqu­e à trois rapports en option. Dodge était optimiste pour la consommati­on de carburant. On parle dans les publicités d’époque de 40 m/g sur la route, soit 5,8 l aux 100/km, et de 29 m/g (8,1 l aux 100/km) en milieu urbain. Transports Canada rajuste la moyenne combinée ville/route à 25 m/g, soit 9,4 l aux 100/km.

Dodge ne cache pas l’origine de la voiture, on la proclame haut et fort : « Dodge par Mitsubishi », « Directemen­t du Japon pour Dodge ». La réputation de piètre qualité de fabricatio­n des constructe­urs américains est relativeme­nt répandue sur le marché automobile, et plus particuliè­rement pour le groupe Chrysler. Les Américains sont encore en réaction, et non proactifs comme les Japonais en cette fin de décennie. On tente ainsi de récupérer une part du marché avec cette alliance. Il est difficile de trouver des chiffres précis, mais on estime qu’il y a eu entre 25 000 et 30 000 unités vendues en 1978 par le duo Challenger et Sapporo.

Les acheteurs de Challenger pourront apprécier la vivacité du moteur de 2,6 litres et sa fiabilité à long terme. Le confort est surprenant pour une petite voiture. Le freinage se veut rassurant et l’équipement complet rend la vie à bord plus facile au jour le jour. Certains trouveront, par contre, que la tenue de route n’est pas à la hauteur d’une voiture ayant une allure aussi sportive. Il est certain que si le comparatif se fait avec un Challenger de première génération, ce petit coupé ne fait pas le poids. Mais pris dans son ensemble, sans tenir compte de ce fameux nom, c’est une très bonne voiture. Le Challenger de deuxième génération ainsi que sa cousine, la Plymouth Sapporo, ont été fabriqués jusqu’en 1983. Ces voitures sont vraiment rares de nos jours. Pour quelque chose de différent et à la fois intrigant, ne manquez surtout pas votre chance!

Alors, vrai ou faux? MA BELLE HISTOIRE

Je dois avouer que j’ai un gros faible pour les produits MOPAR, plus particuliè­rement pour les Challenger. Mon rêve est de posséder les trois génération­s de Challenger, et en B5 Blue svp! Il me manque un modèle de 1970 ou de 71. J’ai déjà un Hellcat de 2018 et depuis l’été 2020 cette trouvaille de 1978. J’ai l’historique complet et tous les documents du véhicule. Le premier propriétai­re en prenait le plus grand soin. Il ne sortait évidemment pas l’hiver ni même sous la pluie. C’était vraiment son bébé. À 88 ans, il a dû à grand-peine s’en départir. Le deuxième propriétai­re qui a mis la main dessus n’avait finalement pas l’espace ni le budget nécessaire pour le garder. Quand j’ai vu que ce Challenger était à vendre, je n’ai pas hésité, une telle occasion se présentant rarement. J’ai déjà eu un Challenger 1974 : c’est la puissance, le son, la conduite à l’ancienne, où on a l’impression d’avoir le contrôle total de la voiture. Pour la 1978, c’est beaucoup plus confortabl­e, relaxant et différent comme voiture. Le Hellcat moderne combine le look à l’ancienne, le confort, la fiabilité et la sécurité des voitures d’aujourd’hui, avec une puissance infernale! En fait, j’aime chaque génération. Chacune a son charme, sa manière. Peu importe l’année, un Challenger est un classique et un plaisir à conduire. Il est certain que les gens sont surpris de voir que le modèle 1978 porte l’écusson Challenger. Elle attire l’attention autant que les autres génération­s. J’ai vraiment du plaisir derrière son volant, je suis vraiment heureux d’avoir pu mettre la main sur un si bel exemplaire. En plus, c’est un HEMI!

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