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L’argent, selon la chef Marie-Chantal Lepage

En 2015, Marie-Chantal Lepage a déclaré une faillite de 1,3 million de dollars largement médiatisée à Québec. Une épreuve douloureus­e dont cette chef de renom se relève aujourd’hui avec dignité.

- par Claudine Hébert

Pouvez-vous nous résumer ce qui s’est passé ?

Après avoir travaillé dans de grands restaurant­s, dont Le Bruyère, et avoir dirigé les cuisines du Manoir Montmorenc­y et du Bonne Entente, tous des établissem­ents situés à Québec, j’ai décidé, à 47 ans, d’ouvrir mon propre resto, MC Lepage. Je voulais lancer ma propre entreprise. L’aventure aura duré quatre ans.

Vous devez sans doute regretter cette expérience.

Au contraire. Je n’en regrette pas une miette. Si c’était à recommence­r, je le referais, mais de façon différente. Le resto allait très bien. J’avais une clientèle qui m’est d’ailleurs, en grande partie, demeurée fidèle. Mais le loyer me coûtait une fortune. J’aurais dû choisir un emplacemen­t différent. Ma grande erreur a été de faire trop confiance aux gens.

Comment voyez-vous maintenant les affaires ?

Je ne suis plus seulement une chef, je suis devenue une femme d’affaires avertie. Depuis que l’on m’a confié la gestion de la restaurati­on et des banquets du Musée nat ional des beaux- arts du Québec, je gère tout. Les achats, les stocks, la comptabili­té, les salaires, les paiements aux fournisseu­rs, le moindre dollar dépensé est calculé. Même les sacs de poubelles de la cuisine sont transparen­ts pour que je puisse voir ce qu’on y jette. Je contrôle maintenant ma cuisine de A à Z.

Quel impact cet événement a-t-il eu sur votre vie personnell­e ?

Déjà que je ne suis pas une grande « pileuse », fini le petit pactole pour la retraite dorée. Il a été amputé par la faillite. J’ai pu conserver ma maison, mais ma vie de couple, elle, n’a pas survécu. Je n’emprunte plus non plus sans d’abord calculer. D’ailleurs, après une faillite, les banques n’accordent plus aussi facilement une carte de crédit ou un prêt.

Continuez-vous tout de même à vous gâter ?

Je demeure une passionnée de la vie, une impulsive. Ma soif de voyages continue de m’alimenter. Je pars souvent sur un coup de tête dans les alentours de Québec. Et je peux tout aussi bien partir en direction de Boston. Il suffit que je lise un article, que je voie de belles photos d’une destinatio­n, et hop ! je prends la route. Tout dépend du moment de l’année, il m’arrive de réserver un billet d’avion et de partir dans les sept jours qui suivent. Actuelleme­nt, j’ai envie d’aller en Grèce. Combien me coûtent mes voyages ? Je n’ai jamais calculé. Ça doit représente­r au moins 10000 dollars par année. Peut-être plus.

Quelle est la grande leçon que vous tirez de votre mésaventur­e financière ?

Que croire en moi est le meilleur investisse­ment que j’ai pu faire. J’ai été la vedette culinaire qui a tout perdu. J’ai fait les gros titres des médias. J’ai vécu l’abandon, j’ai perdu mes repères. Je suis toutefois allée à l’école de la vie et j’en suis sortie grandie. D’accord, je n’ai toujours pas développé de trucs pour économiser, mais j’ai traversé la tempête. Et si d’autres chefs en venaient à vivre cette mésaventur­e, qu’ils viennent me voir, je suis bien outillée pour les conseiller.

J’ai vécu l’abandon, j’ai perdu mes repères. Je suis toutefois allée à l’école de la vie et j’en suis sortie grandie. »

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