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Devenir un pro du coupon à l’ère numérique

Le bon vieux coupon papier a été détrôné par les applicatio­ns mobiles. Pour dénicher les réductions, aujourd’hui, il vous faut regarder sur votre téléphone intelligen­t.

- par Didier Bert

En sept petites années, Lili Marchand a vu changer la pratique du couponnage. À l’époque, elle avait lancé le site OnMagasine.ca, où elle diffusait les coupons émis par les marques. « J’avais vu des émissions de télévision sur Extreme

Couponing aux États-Unis, explique-t-elle. Mais ce qui m’intéressai­t, c’était de montrer aux gens qu’ils pouvaient avoir le contrôle sur leurs dépenses. »

C’est qu’à l’époque, vous deviez consacrer du temps pour trouver les coupons qui vous intéressai­ent. À ses débuts, Lili Marchand passait « de 12 à 14 heures par jour » à chercher des coupons valides au Québec, et à les indiquer aux visiteurs de son site. « C’est devenu mon activité pro- fessionnel­le à temps plein », dit-elle. Son activité consistait à faire le tour des circulaire­s à votre place, pour vous faire gagner du temps tout en profitant des aubaines.

C’était le bon temps du couponnage papier, quand vous pouviez vous demander ce qui poussait les détaillant­s et les fabricants à offrir de si grosses réductions sur leurs prix. « On pouvait trouver des poitrines de poulet à 25 cents l’unité », souligne la championne couponneus­e.

« Quand une entreprise donne un coupon, c’est pour pousser un acte d’achat à court terme, explique Francine Rodier, professeur­e au Départemen­t de marketing de l’École des sciences de la gestion de l’UQAM. Mais elle ne peut pas le faire de

manière trop fréquente, sinon elle habitue le consommate­ur à payer moins cher. »

Cette stratégie est utile pour vous faire connaître un produit nouveau sur le marché, ou pour mettre la marque en évidence durant une période ciblée, poursuit la professeur­e.

Avec l’Internet mobile, le couponnage prend moins de temps. Les technologi­es ont permis aux détaillant­s et aux fabricants d’affiner leur offre de rabais, souvent plus avantageus­e pour les consommate­urs. « Aujourd’hui la tendance est à la personnali­sation des coupons », affirme Alain Tadros, vice-président marketing chez Metro.

L’épicier utilise les renseignem­ents fournis par ses clients sur son épicerie en ligne Metro.ca et auprès des détenteurs de la carte de membre Metro& moi. Il peut alors envoyer des coupons correspond­ant à vos habitudes d’achat, et aux besoins typiques de son profil de consommate­ur. Facebook n'a pas inventé le ciblage publicitai­re.

Avez-vous des enfants ? En l’indiquant, vous obtenez des coupons adaptés à leur âge ou aux événements tels que la rentrée scolaire. Êtes- vous végétarien ? Vous pourriez recevoir des rabais ciblés, évitant les offres sur les côtes levées. Plus le consommate­ur est exhaustif en remplissan­t les formulaire­s d’inscriptio­n aux programmes des détaillant­s, plus il pourra recevoir des coupons utiles.

Vous n’avez pas de carte de fidélité de l’enseigne où vous magasinez ? Jetez un coup d’oeil aux reçus de caisse ! Le détaillant est en mesure de vous soumettre des coupons personnali­sés dès l’impression du reçu. C’est ce qui se produit quand un employé de caisse vous tend un coupon imprimé avec votre facture. En tenant compte des achats que vous venez de payer, le système informatiq­ue peut proposer un coupon de réduction sur des produits comparable­s ou complément­aires.

À la recherche du ciblage

Le portrait du pro du couponnage a bien changé. Il y a dix ans, il déambulait dans les allées des magasins avec une liasse de coupons dans la main. Aujourd’hui, il a le nez rivé sur son portable, où sa liste d’épicerie est préenregis­trée en fonction des réductions offertes.

En effet, des entreprise­s ont adapté le concept de l’agrégation de coupons aux supports numériques mobiles. L’intérêt des consommate­urs pour les prix réduits a attiré d’autres joueurs que les fabricants et les détaillant­s dans l’arène du couponnage. Des entreprise­s ont ainsi développé de nouveaux services pour apporter les réductions aux consommate­urs (en se rémunérant au passage). On trouve désormais des applicatio­ns mobiles plus évoluées qu’une simple centralisa­tion des réductions.

Comme le site de Lili Marchand, leur objectif est de vous éviter de passer des heures à parcourir les circulaire­s à la recherche des coupons qui vous intéressen­t. De plus, ces applicatio­ns vous permettent de personnali­ser vos recherches de bonnes affaires. Certaines applicatio­ns mobiles, comme Reebee, vous permettent d’emporter les circulaire­s de plusieurs enseignes dans votre poche. Mais pas seulement ! Saisissez « concombre » et vous obtenez les meilleurs prix de la semaine pour ce produit. Vous n’avez plus qu’à cliquer sur votre choix pour l’ajouter à votre liste d’épicerie.

Groupe Amik, une entreprise de Québec, a investi ce marché avec son offre Amikash, qui propose des remises en argent et des coupons à ses membres quand ils achètent des produits en ligne auprès de ses partenaire­s. « Les marchands en ligne nous contactent pour atteindre nos membres, qui sont des consommate­urs que nous avons ciblés », explique Geneviève Faucher, vice-présidente développem­ent des affaires chez Groupe Amik. Quand Groupe Amik négocie un rabais avec une enseigne, elle se rémunère en conservant une part de la remise. Par exemple, pour un rabais ou une remise en argent de 10% utilisé par un consommate­ur, Groupe Amik peut obtenir une rémunérati­on équivalent­e à la moitié de l’avantage, soit ici 5% du prix du produit.

L’entreprise revendique 100000 membres au Québec, ce qui lui permet d’attirer les marchands en ligne en jouant sur la force du nombre. Les membres ont accès à des réductions négociées spécifique­ment pour eux, adaptées à leurs habitudes d’achat.

Mais les détaillant­s n’ont pas pour autant renoncé complèteme­nt à diffuser des circulaire­s papier… « On pourrait croire que le coupon est moins utilisé, mais ce n’est pas le cas… parce qu’on aime ça ! assure Francine Rodier. C’est une façon de troquer un peu de son temps contre des prix réduits. »

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