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Désintox

- Daniel.germain@tc.tc Daniel Germain Chef de publicatio­n

Vous pourriez terminer la lecture de notre dossier au sujet du transport avec le sentiment qu’on ne présente pas la situation de manière équilibrée. Vous n’auriez pas tort. On a consacré beaucoup d’espace à déplorer les conséquenc­es de l’usage massif de l’automobile, on n’a pas vraiment innové à cet égard, et ça pourrait vous sembler tannant : embouteill­ages monstres, émissions non moins monstrueus­es de CO2, gouffre financier personnel, santé déclinante… Oui, encore un maudit procès du voiturage en solo! Peut-on nous laisser tranquille­s?

C’est vrai, nous n’avons pas abordé les aspects pratiques de posséder une voiture, avec ses sièges chauffants, son système anticollis­ion, sa capacité de chargement, ses banquettes rabattable­s et ses 18 porte-gobelets. Pas un mot non plus, hélas, sur ce mode d’expression de ses valeurs familiales, de son pragmatism­e, de son style de vie, de son statut social, de sa virilité, de sa jeunesse et de son émancipati­on. On a poussé la négligence jusqu’à omettre ce formidable pouvoir que nous procure la voiture: sortir des sentiers battus. On a vraiment fait preuve de mauvaise foi en passant sous silence ce que l’automobile incarne le plus: la liberté.

Mais ça, c’est déjà dit, ad nauseam, à la télé, dans les journaux, à la radio, sur l’internet à travers des slogans creux. Le message est bien ancré, tellement qu’on n’en remarque plus le côté grotesque, la déconnexio­n avec la réalité.

Nous ne sommes pas contre la voiture. Elle est nécessaire là où les options sont rares, en région, sans doute aussi quand il y a des enfants à déposer à la garderie et pour aller faire les courses le week-end. Il y a toutefois de quoi pleurer quand on voit toutes ces voitures immobiles, avec un seul être humain à bord, toujours plus nombreuses, sur un réseau routier congestion­né. Chaque jour, dans la seule région de Montréal, les automobili­stes transporte­nt près de 15 millions de sièges vides, soit cinq fois la capacité de la Société de transport de Montréal.

On ne fait pas que chialer, on se montre aussi constructi­f. L’essentiel de notre dossier porte sur ceux qui ont réussi à se libérer de ce qui semble être une dépendance à l’auto, et parfois dans des conditions qui ne sont pas des plus favorables.

On renonce souvent à s’engager dans une telle démarche, à trouver des solutions, à sortir du confort de son VUS, du fait que la majorité ne s’en préoccupe pas. «Pourquoi devrais-je, moi, faire des efforts pour explorer d’autres options?», se dit-on en regardant son voisin aussi bloqué que soi dans l’embouteill­age.

Les exemples ne se trouvent pas dans le trafic. Vous aurez plus de chances de les trouver dans nos pages. +

Il y a toutefois de quoi pleurer quand on voit toutes ces voitures immobiles, avec un seul être humain à bord»

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