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Relève d’entreprise

Relève d’entreprise

- Série 3 de 3 Anne Gaignaire redactionl­esaffaires@tc.tc

Un jeune homme seul face à la relève

Le transfert d’une entreprise familiale pose plusieurs défis. Des dirigeants qui ont négocié le virage témoignent de leur expérience vécue.

Chez Laflamme et associés audioproth­ésistes, le passage du flambeau de la deuxième à la troisième génération est en cours. De quatre associés de la famille, l’avenir repose, pour le moment, sur les épaules de Patrice Laflamme, le petit-fils du fondateur et seul releveur de sa génération.

Suzanne, 64 ans, Denise, 61 ans, Daniel, 57 ans, et Robert, 48 ans, se sont demandé pendant

un certain temps qui allait leur succéder. Patrice Laflamme, 28 ans, et unique releveur pour le moment, a mis du temps à se décider à rejoindre l’entreprise, qui compte aujourd’hui sept bureaux à Montréal, dans la couronne nord et en Montérégie. «J’ai fait des études en administra­tion, ça ne me tentait pas trop d’aller dans ce secteur d’activité où les clients sont principale­ment des personnes âgées. Et puis j’ai eu le déclic. Je ne me voyais pas laisser cette entreprise sortir de la famille. L’idée de gérer l’entreprise et d’être mon propre patron m’a plu finalement », se souvient Patrice Laflamme, dans la société depuis sept ans comme audioproth­ésiste et chargé du marketing.

La transmissi­on concrète de l’entreprise est en cours puisque Denise Laflamme a prévu de partir à la retraite dans cinq ans et qu’elle a déjà commencé à vendre ses actions à son neveu. Daniel, le père de Patrice, lui, commence à penser à une retraite progressiv­e. «Je travaille trois jours par semaine en ce moment. À 60 ans, je voudrais passer à deux jours et tenir comme cela peut-être pendant encore quatre ou cinq ans », indique Daniel Laflamme. Le départ à la retraite de Suzanne, 64 ans, n’est quant à lui pas encore prévu.

Un plan sur cinq ans « On a un plan sur cinq à sept ans. On ne voulait pas que ce soit un changement d’un seul coup. Je suis content d’avoir encore autour de moi cette génération. Ce sont mes anges gardiens », reconnaît Patrice Laflamme, qui appréhende un peu le départ de son père. «J’aimerais qu’il reste encore 20 ans. Tout le monde le connaît, c’est la figure de l’entreprise. C’est comme si une équipe perdait son meilleur joueur. Le défi, ce sera le transfert de la clientèle, qui lui est très attachée», poursuit l’audioproth­ésiste.

Les membres de la deuxième génération, excepté Denise, qui gère le volet administra­tif, sont audioproth­ésistes. Ils ont toujours tenu à exercer leur métier tout en s’occupant de la gestion de la société. Une voie que veut suivre le releveur. Il pense toutefois qu’il passera plus de temps que ses aînés à la gestion de l’entreprise, qui a pris de l’ampleur depuis la première reprise dans les années 1990.

Le jeune homme a plein d’idées pour l’avenir de la société, mais il se sent un peu seul pour prendre la relève. «Je voudrais bien être avec quelqu’un de mon âge, même si ce n’est pas quelqu’un de ma famille. Il sentirait les choses comme moi, de façon actuelle. Ça me rassurerai­t et ça serait un bon moteur pour l’entreprise », confie le jeune homme. Ni sa soeur ni ses cousins – à l’exception de l’un d’entre eux qui a fait savoir tout récemment qu’il s’intéressai­t à la relève – ne veulent l’accompagne­r dans l’aventure. Par conséquent, «on ne va pas pouvoir y arriver seulement avec la famille, constate Daniel Laflamme : il va falloir intégrer des étrangers ».

«On est en train de repérer une relève à l’interne et, si ce n’est pas possible, on cherchera à l’externe», complète Patrice Laflamme. Car, au-delà de la solitude comme dirigeant, se pose le problème du rachat des parts des trois action- naires les plus âgés dans un court laps de temps. Patrice a déjà commencé à racheter, grâce à un prêt interne, la moitié des actions de sa tante, ce qui pèse déjà beaucoup sur ses finances.

Choc des génération­s L’autre défi, c’est de transférer les compétence­s. Sur ce plan, le remplaceme­nt de Denise, chargée de la gestion administra­tive et des ressources humaines, se prépare déjà. «Nous allons lui chercher un adjoint à l’externe qui pourra l’épauler et apprendre à ses côtés pour pouvoir prendre le relais quand elle partira », poursuit l’audioproth­ésiste.

Pendant ce temps, Patrice imprime sa marque et modernise peu à peu l’entreprise créée en 1968 par son grand-père, Maurice Laflamme. Il bouscule un peu l’équipe plus ancienne, qui prend depuis toujours les décisions par consensus. Son premier projet dans l’entreprise a été de soutenir son oncle le plus jeune, Robert, pour convaincre l’ensemble des actionnair­es d’implanter un système informatiq­ue à la page et faire un site Web digne de ce nom.

Un choc des génération­s semble-t-il bien accepté par l’ancienne garde qui, même si les changement­s ne la convainque­nt pas toujours, comprend que les temps changent et que la pérennité de l’entreprise passe par l’adaptation.

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